1. Un défaut de langue

L’animal n’est pas nommé car la langue ne dispose pas de l’appellatif adéquat. Elle recourt donc à une périphrase explicitante qui définit l’être par le genre, une “ Bête ”, suivi d’une caractérisation identifiante, “ innommable ”. La poésie pallie ainsi en quelque sorte un défaut de langue. L’animal existe, mais la langue n’a pas pris en charge son existence. La réalité préexiste ainsi à sa nomination et, si le langage est communication, il ne permet cependant pas d’en nommer toutes les entités. Il subsiste un en deçà du langage. Le manque d’étiquette est cependant lié à une méconnaissance plus large de cet animal représenté à Lascaux dont témoigne le nom qu’on lui donne généralement : à cause des deux cornes possibles qui le coiffent, il a été considéré comme la représentation d’une licorne, l’indétermination du dessin trouvant dans cet animal imaginaire un modèle adéquat 133 .

Notes
133.

“ La Bête innommable ” a été publié dans les Cahiers d’Art avec une photographie de l’étrange animal de Lascaux, accompagné d’une légende.