Le dynamique spatiale est l’expression même du rendez-vous amoureux puisque les verbes signifient la succession d’un mouvement centripète, d’une rencontre, et d’un mouvement centrifuge. La rencontre est bien une passe, au sens de passage, car l’évolution spatiale en est la préparation mais aussi la représentation. C’est aussi, le mot “ passe ” fonctionnant en syllepse, une relation sexuelle généralement vénale, but de la convergence. L’amante n’est jamais décrite, seule sa féminité est formulée dans l’accord de “ la première ”. Mais la relation érotique est signifiée par “ yeux ”, “ faveurs ”, “ baiser ”, “ conquête ”, “ convoiteurs ”, termes auxquels on peut rattacher “ flamme ” par sa relation de paronymie avec femme 619 . La salamandre finale est d’ailleurs l’emblème de l’ardeur amoureuse.
Cette rencontre, poétique par excellence, peut refléter celle qui s’effectue avec la poésie, qui a souvent des allures de femme dans l’oeuvre de René Char, et l’emploi du terme “ chef-d’œuvre ” en est un signe. La salamandre peut faire de cette œuvre l’image d’une réalisation plus énigmatique : elle est le composant symbolique d’une phase du processus alchimique qui vise la réalisation du grand-œuvre, image fréquente de la création poétique.
La rencontre, qu’elle soit érotique ou poétique, ne révèle l’essence de l’être qu’au futur, ou plutôt elle ne rend possible l’émergence finale des termes “ dauphine ” et “ salamandre ” qu’après avoir impliqué la personne dans une séquence réelle. Une dauphine est d’ailleurs celle qui précisément se définit comme un être en attente d’une position. Son identité intègre ce statut de prétendante. En poésie, la rencontre comme circonstance de l’émergence de l’être, impossible au présent, est rendue possible par l’emploi du futur.
Une semblable paronymie rapproche “ femme ” et “ famine ” dans “ Hommage et famine ” (Fureur et Mystère, O. C., p. 147).