1.5.1. La position de Freud : le contre-transfert est un obstacle

En 1915, Freud publie la Technique Psychanalytique. Il a beaucoup réfléchi sur le transfert et en formule la théorisation.

Freud découvre que c’est la relation aux figures parentales qui est revécue dans le transfert. Ceci en fait un processus structurant l’ensemble de la cure sur le prototype des conflits infantiles. Il aboutit au dégagement d’une notion nouvelle, celle de névrose de transfert :

‘« [...] nous réussissons à conférer à tous les symptômes morbides une signification de transfert nouvelle, et à remplacer sa névrose ordinaire par une névrose de transfert dont le travail thérapeutique va le guérir »22

C’est en référence au travail de l’analyste que S. Freud utilise l’expression de contre-transfert :

‘« D’autres innovations d’ordre technique intéressent la personne même du médecin. Notre attention s’est portée sur le « contre-transfert » qui s’établit chez le médecin par suite de l’influence qu’exerce le patient sur les sentiments inconscients de son analyste. »23

En 1915, dans « Observations sur l’amour de transfert », Freud fait usage à nouveau du terme contre-transfert. Il traite alors cette question sous l’angle de la relation entre un analyste et une patiente. Il s’agit, dit-il, d’une situation fréquente : celle du cas où une patiente est amoureuse de son analyste. En fait, dans tout traitement psychanalytique s’établit, sans que le médecin ne fasse rien pour cela, une intense relation affective du patient à la personne de l’analyste. Freud ne nie pas que l’analyste puisse être touché par le contre-transfert, mais il ne lui reconnaît pas de valeur quant à la dynamique de la cure. Sa formulation du contre-transfert répond d’abord d’une définition économique de la dépense d’énergie épargnée. Il donne des recommandations : Il souligne

‘« [...] que tout analyste ne peut mener à bien ses traitements qu’autant que ses propres complexes et ses résistances intérieures le lui permettent .»24

Ce qui a pour corollaire la nécessité pour l’analyste de se soumettre à une analyse personnelle.

Pour Freud la position de l’analyste est la méfiance :

‘« Pour le médecin, ce fait constitue un précieux enseignement et un avertissement salutaire d’avoir à se méfier d’un contre-transfert peut-être possible. »25

Le début de la phrase semble aller dans le sens du contre-transfert comme instrument de connaissance du transfert du patient. Mais la seconde proposition ramène à une conception défensive : il faut se méfier d’un possible contre-transfert. Cependant le médecin doit se garder de donner satisfaction au patient car

‘« [...] le traitement doit se pratiquer dans l’abstinence. »26

Freud donne des conseils de prudence, appelle à la mise en garde contre l’amour de transfert, préconise la froideur des sentiments.

‘« Pour l’analysé, le médecin doit demeurer impénétrable et, à la manière d’un miroir, ne faire que refléter ce qu’on lui montre. Pratiquement, il est vrai, l’on ne saurait s’opposer à ce qu’un psychothérapeute combine une certaine dose d’analyse à quelque traitement par suggestion, dans le but d’obtenir plus rapidement un résultat thérapeutique patent, comme, par exemple, dans les maisons de santé, mais alors ce praticien doit se rendre compte lui-même de ce qu’il fait et ne pas confondre sa méthode avec une psychanalyse véritable. »27

Notes
22.

FREUD S., La technique psychanalytique, p.113. (49)

23.

La technique psychanalytique, op. cit., p.27. (49)

24.

Ibidem, p.27. (49)

25.

Ibidem, p.118. (49)

26.

La technique psychanalytique, op. cit., p.122. (49)

27.

Ibidem, p.69. (49)