INTERVIEW N°11
Rencontre avec Howard Buten le 19 décembre 1997 au théâtre de Privas
Directeur du « Centre Adam Shelton »

Rencontre qui se déroule après le spectacle. H. Buten me consacre 1h30 environ de conversation. Ne pense pas que l’autisme est contagieux, c’est pareil avec toutes les populations. Les gamins on les aime, d’ailleurs il dit que ce sont ses gosses.

L’atmosphère de l’institution. Elle est importante, c’est gai, accueillant, il y a du respect pour les jeunes. Mais tout le monde dit ça mais c’est pas vrai. Howard Buten a choisi son personnel, ce sont des gens dynamiques, intelligents « les champions du monde ! ». Les gens qui travaillent avec lui ont en commun de trouver que l’autisme est « drôle », pas quand ça hurle, pas quand ça souffre. Lui il y a un truc qui se passe avec les jeunes, il sait comment faire, toujours, mais il ne sait pas comment. Il cherche toujours à savoir comment c’est pour le jeune à l’intérieur. Quels ressentis sensoriels, qu’est-ce que ça lui fait à lui de l’imaginer. Sa célébrité lui a permis de choisir son équipe. Il y a des éducateurs, des infirmiers, l’équipe psy (lui, un psychiatre, psychologue ?). Il y a beaucoup d’activités dont deux écoles de cirque (ce sont des éducateurs et des psychomotriciens formés pour ça). Il y a aussi des séances individuelles de psychomotricité pour certains jeunes. L’équipe des psy comprend plusieurs tendances théoriques : Freud, Tustin, Malher, post lacanien (Lefort) des lacaniens. Il trouve qu’on ne peut rien en tirer au niveau de l’application. On peut utiliser et croire les idées théoriques de Freud (dans la névrose il y a un ou des traumatismes qui sont refoulés et les faire revenir à la conscience guérit) sans s’allonger sur un divan. Quelqu’un travaille avec Geneviève Haag et il aime bien, ça lui parle. Il a envoyé une éducatrice se former dans une école américaine. Aux Etats Unis tout le monde fonctionne avec la méthode TEACCH et depuis longtemps. Bettheleim travaillait dans son coin à Chicago et il était beaucoup moins connu qu’en France. C’est pas possible de travailler comme lui sans les parents. Schopler a commencé à travailler sur le comportementalisme puis il a mis au point des méthodes rééducatives pour les autistes. C’est beaucoup mieux fait aux Etats Unis : école de deux cents enfants avec cinquante classes TEACCH, les enfants sont cinq par classe avec un enseignant et un assistant, ils restent toute la journée, il y a des pauses toutes les vingt minutes. En France on n’est pas prêt.

Trois personnes ont demandé à être formées à la communication facilitée, elles en sont revenues septiques mais elles le font avec plusieurs enfants.

Au centre Adam Shelton il y a trente deux jeunes (avec les temps partiels).

Une réunion avec tout le monde une fois par semaine pour parler pendant des heures d’un enfant. On fait le tour des activités, les gens ont préparé quelque chose. Les éducateurs racontent, ils disent si c’est positif ou négatif. Ils constatent mais ils ne veulent pas interpréter, c’est à l’équipe psy de le faire.

Je demande s’ils parlent de ce qu’ils ressentent ?

J’aimerais que tout le monde écrive même une page. Il est question d’une supervision mais elle n’est pas demandée par tout le monde. Peut-elle fonctionner si tout le monde ne participe pas ? avec la direction présente ? puisque c’est un déballage, une thérapie de groupe. C’est très familier au centre, on se tutoie, on se fait la bise mais je dis tout le temps ... quand j’étais stagiaire j’ai été très frappé par ça, la directrice quelques fois ne me faisait pas la bise et je me demandais ce que j’avais fait. Aussi, moi je touche beaucoup les jeunes et avec les jeunes filles autistes il n’y a pas de limites. Est-ce que ça trouble ?

Les stagiaires on ne leur dit pas ce qu’il faut faire, ils se débrouillent, ils trouvent ce qui leur convient. Les stagiaires sont sélectionnés soigneusement. Une, dernièrement s’est fait porter malade, une semaine, deux semaines... elle ne supporte pas les autistes, c’est trop frustrant, elle va partir, on a le droit que ça ne colle pas avec cette population là, chacun sa population.

Howard Buten n’est pas très optimiste, « nous sommes jeunes » mais après plusieurs années de fonctionnement « nous allons être un IME comme les autres ».

Très impliqué dans cette institution où il est présent tous les jours, « je ne pense qu’à ça » c’est pour cette raison qu’il ne fait des spectacles que le week-end. D’ailleurs ce soir je suis encore là bas, je ne suis pas artiste, demain je serais artiste. Ce qui l’intéresse c’est la science, ce sont des hypothèses et non pas des applications.