c) Que reste-t-il du CUC en janvier 1946 ?

Les personnes qui ont contribué à sa création et à son développement comme Madeleine Leroy, l’abbé Berrar et Henri Bédarida gardent leur poste. Les méthodes de travail (équipes de recherche, fiches d’informations, revue) sont conservées. La grande nouveauté réside donc dans l’élargissement du recrutement puisque désormais peuvent participer à l’élaboration d’une synthèse chrétienne tous les diplômés catholiques. De fait, le CCIF est le premier organisme catholique en France à envisager ce dialogue entre des personnes différentes par leur formation, leur travail et leur rôle dans la société. Le cardinal Suhard, archevêque de Paris confirme, peu de temps après, le rôle que le Centre veut jouer :

‘"Le CCIF a sagement marqué qu’il n’entendait pas nuire à cette richesse, mais au contraire, lui donner plus de rayonnement en fédérant des groupes qui, sans lien entre eux, risquaient de rester fermés sur leurs préoccupations particulières." 136

Le lien vertical entre étudiants et diplômés qui avait été à l’origine du CUC est transformé en un lien horizontal entre intellectuels de spécialités différentes, regroupés en une vaste communauté de travail. Trois ans plus tard, Henri Bédarida rappellera les grands principes qui ont donné naissance au CCIF :

‘"(…) le CCIF a été créé pour un effort d’approfondissement de leur foi personnelle et de diffusion de la pensée chrétienne. Ensuite pour un témoignage commun des catholiques dans l’ordre de la doctrine, en face des (…) idéologies fondées sur une conception matérialiste de l’homme (…). Le CCIF est au service de tous les membres des associations ou groupements qu’il fédère, et aussi des intellectuels (…) qui restent isolés. Il entend leur fournir des occasions de rencontres et la possibilité de mettre en commun leurs efforts pour l’élaboration de cette synthèse catholique Le CCIF poursuit une des fins que s’était donné (…) le CUC : aider les étudiants et aussi les diplômés à acquérir ou approfondir une culture religieuse qui aille de pair avec leur culture profane, scientifique, technique (…). C’est pour élargir les horizons scientifiques que le CCIF vise à établir une grande et fraternelle communauté de recherche chrétienne, en vu de construire, à la lumière du dogme, un humanisme renouvelé parfaitement incorporé au monde temporel moderne." 137

Mais cette double fonction de recherche et de coordination n’est pas sans ambiguïté : comment concilier le rassemblement où le nombre fait la force et la réflexion intellectuelle où c’est la qualité des membres qui importe ? Quelle place donner à la fédération ? Quelles activités privilégier ? Autant de questions qui, peu à peu, trouveront leur réponse.

Notes
136.

Cardinal Suhard à André Aumonier, 30 septembre 1946, p. 2, carton 28, AICP.

137.

Henri Bédarida, Journal de Pax Romana, 1, mai 1949, p. 1.