En mars 1947, sept équipes (elles prennent alors le nom de sections) sont répertoriées : "Philosophie-sciences" que préside Paul Germain; "Philosophie existentielle" que coordonne Claude Ducot ; "Église : problèmes historiques et contemporains" dirigée par Jean Meyriat ; "Éducation et Enseignement" avec Madeleine Leroy ; "Science et Conscience" avec Melle Mortier; "Technique moderne et Vie sociale" avec Legrelle ; "Christianisme et Civilisation" avec Charles Anel. Le travail des sections est coordonné par le comité directeur :
‘"Chaque section est indépendante mais le but étant le même pour toutes (recherche de la pensée catholique et diffusion) l’organisation générale est identique (…). Les sections donnent des cours, des conférences, publient brochures et revues. (…) Il existe une section générale du centre qui s’occupe des cours, conférences religieuses d’ordre général." 223 ’Le travail qui s’y accomplit est très divers : certaines équipes organisent des conférences, d’autres réunissent des étudiants en recherche de sujet de thèse, d’autres enfin établissent des bibliographies exhaustives sur des thèmes particuliers. Un bilan du travail de ces équipes a été conservé pour la seule année universitaire 1946-1947 : il souligne à la fois la diversité des travaux et l’échec du travail tel que l’avait conçu le CCIF à ses origines. L’équipe "Philosophie-sciences" organise des conférences dans la salle de la Société de géographie (qui réunit 200 à 300 personnes) et des séances de travail (rassemblant une vingtaine de personnes). L’équipe "Philosophie existentielle" prépare des conférences suivies de discussions (qui drainent 60 à 80 personnes) ; l’équipe "Église : problèmes historiques et contemporains" constitue une bibliographie sur le thème du christianisme et de la civilisation en établissant la liste des principales revues françaises (pas moins de 23 !) et en entreprenant leur dépouillement systématique 224 . L’équipe "Éducation et enseignement" qui compte une dizaine de personnes établit une bibliographie sur son sujet ; quant à la dernière "Science et conscience", elle organise plusieurs confrontations sur ce thème qui rassemblent une vingtaine de personnes 225 .
Entre 1948 et 1951, une cinquantaine de laïcs et une dizaine d’ecclésiastiques (sans compter la spécifique UCSF) ont participé au travail des sections. En 1950, devant la maigreur des résultats obtenus, le bureau demande à chaque équipe de nommer un chef de section et un secrétaire : ‘"le chef doit être d’une notoriété telle qu’il puisse attirer par sa présence les membres de l’équipe"’ ‘ 226 ’ ‘.’ Le projet reste lettre morte. En mars 1951, les responsables des sections sont convoqués pour préparer les activités intellectuelles du Centre. Sont invités : Charles Anel, le journaliste Jean Baboulène 227 , le père Beirnaert, le philosophe Maurice Blin, l’abbé Brien, l’ethnologue Paul-Henry Chombart de Lauwe 228 , Jean-Baptiste Duroselle, le romancier Luc Estang 229 , le journaliste Jean de Fabrègues 230 , le poète Stanislas Fumet 231 , le juriste Étienne de Gouvernel, Alain Guillermou, le philosophe Pierre Joulia 232 , le philosophe Olivier Lacombe 233 , Emmanuel de Las Cases, la philosophe Geneviève Lewis, l’homme de lettres Jacques Madaule 234 , l’historien Marcel Reinhard et la philosophe Melle Taboulot 235 . Ces personnes, tout en n’étant pas chefs de section, étaient considérées par le bureau comme les personnalités essentielles au développement des équipes de recherche.
Dans les années suivantes, les créations se poursuivent : ainsi en novembre 1952, cent dix personnes susceptibles d’apporter leur concours à la section historique sont recensées 236 . Cette équipe organise d’ailleurs quelques réunions : l’une est consacrée à ‘"Richelieu et l’unité européenne"’ ‘ 237 ’, une deuxième aux "archives des congrégations religieuses". Une section intitulée "Social et politique" et dont la création semble remonter à décembre 1951, rassemble Jean Baboulène, l’industriel Henri Rollet 238 , Jammes, Marchal, le juriste Georges Vedel, le député Maurice-René Simonnet et Michel Habib 239 . Plusieurs réunions ont lieu en 1952-1953 : l’équipe réfléchit sur l’espérance marxiste et l’espérance chrétienne et invite des acteurs du monde politique 240 .
Parmi toutes les sections, c’est finalement la section théologie qui retient l’attention. C’est, avec la section philosophique, les deux sont souvent couplées d’ailleurs, la section la plus vivante et la plus organisée. Elles fonctionnent depuis la rentrée 1947, trouvant à la fois une certaine régularité dans les réunions et rassemblant les meilleurs théologiens et philosophes catholiques 241 . La liste est élogieuse : les pères Beirnaert, Bouillard 242 , Bouyer 243 , Congar, Chenu 244 , Dabosville 245 , Daniélou, Dubarle, Duméry, Féret 246 , Fessard 247 , François de Sainte-Marie 248 , Golliet 249 , Henry 250 , de Lubac 251 , Maydieu 252 , d’Ouince, les abbés Brien et Colin 253 et parmi les laïcs : Maurice Blin, Étienne Borne 254 , Yvon Brès 255 , Melle Carroi, Henri Gouhier 256 , Jean Guitton 257 , Pierre Joulia, Geneviève Lewis, Olivier Lacombe, Gilbert Spire 258 , Melle Taboulot 259 . Parfois des intellectuels non croyants sont également conviés à ces réunions comme le philosophe Jean Beaufret, spécialiste de Martin Heidegger 260 , Jean Hyppolite, directeur de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm 261 .
L’équipe s’attache à redéfinir les grands thèmes théologiques et à les mettre en dialogue avec la modernité. Plusieurs séances sont ainsi consacrées au "Mystère en théologie" :
‘"- Mystère au sens ancien du mot (mystère chrétien, mystère païen, dom Casel).Le 12 décembre 1950, une réunion est organisée sur l’essentielle question de la nature et la grâce. Le 29 novembre et le 19 décembre 1952, la section se rassemble pour analyser l’athéisme dans ses formes modernes 263 . L’importance de cette section est d’autant plus à signaler que le statut de la recherche à l’Institut catholique de Paris, en ces années d’après-guerre, reste faible : la modernité culturelle y est fort peu présente ; quant aux liens entre la Faculté de philosophie et celle de théologie, ils sont quasiment inexistants 264 . Le CCIF comble donc un vide intellectuel de premier ordre.
Si dans ses premières brochures le CCIF semblait manifester une certaine visée apologétique, l’étude du travail des équipes de recherche souligne au contraire l’ouverture du foyer de réflexion. Le cas de la section philosophico-théologique est de ce point de vue emblématique : la valeur de ses membres l’éloigne de tout discours intransigeant comme le soulignent deux événements datés de 1947.
"Équipes de recherche, comité de liaison", p. 1-2, carton 4, AICP.
Études, Construire, Cité Nouvelle, Cahiers du clergé rural, Dieu vivant, Irénikon, La Vie spirituelle, La Vie intellectuelle, etc… liste dans le compte rendu de la réunion du 19 février 1947, p. 1, carton 4, AICP.
Rapport moral de l’assemblée générale pour l’année 1946-1947, ARMA.
André Aumonier à M. Dursel, octobre 1950, p. 1.
Ancien secrétaire général de la JEC, invité par André Mandouze à collaborer à Témoignage chrétien, il en devient le directeur-adjoint en décembre 1945.
Né en 1913, il travaille d’abord sur l’Afrique puis à partir de 1949 étudie le comportement en milieu urbain.
Né en 1911, poète, romancier et critique littéraire La Croix. Il devient par la suite lecteur au Seuil.
Né en 1906, après avoir animé avant la guerre les cahiers de Civilisation, il entre à La France catholique.
Né en 1896, ami de Jacques Maritain avec lequel il fonde le Roseau d’or, il devient par la suite directeur de Temps présent (qui remplace Sept) tout en menant une carrière de poète.
Ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1919), il est professeur de Lettres supérieures au lycée Jeanson-de-Sailly.
Né en 1904, ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1925) c’est un fidèle du cercle de Meudon. Il se spécialise dans l’étude des courants philosophiques indiens.
Né en 1898, agrégé d’histoire, membre de l’École française de Rome, Jacques Madaule s’intéresse à la littérature catholique.
Convocation du 10 mars 1951, carton 4, AICP.
"Membres de la section historique et groupe René Grousset", 5 novembre 1952, 1p., Parmi les membres se trouvent Victor-Lucien Tapié, Émile Coornaert, Maurice Vaussard, Michel Mollat, Charles Anel, carton 4, AICP.
Réunion du 13 décembre 1952.
Né en 1917, industriel et historien (il soutient en 1948 une thèse sur "L’action sociale des catholiques en France"). Il est également vice-président du Centre français du patronat chrétien.
Convocation décembre 1950, minutier 1950-1952, ARMA.
Deux maires en février 1950 sont invités à présenter leurs expériences d’élus et d’administrateurs, carton 4, AICP.
Une chemise comportant les activités de la section a été conservée, carton 4, AICP.
Né en 1908, membre de la compagnie de Jésus, théologien professeur à Fourvière, il devient par la suite spécialiste de la théologie barthienne.
Né en 1913, pasteur en 1936, il entre dans l’Église catholique en 1939. Professeur de théologie à l’Institut catholique de Paris.
Né en 1895, il travaille à donner une dimension historicisée à la théologie thomiste. Régent des études du Saulchoir, il est contraint par les autorités ecclésiastiques de quitter cette fonction en 1942. Il s’implique également dans le renouveau missionnaire et s’intéresse aux grandes mutations sociales.
Aumônier de la Paroisse universitaire, il succède après la guerre au père Brillet.
Né en 1904, il enseigne au Saulchoir puis participe à la fondation du Centre de pastorale liturgique tout en donnant des cours à l’Institut catholique de Paris.
Né en 1897, rédacteur à la revue Études, il est l’un des principaux spécialistes de Hegel.
Carme de la communauté d’Avon et ami de Jacques Maritain.
Ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1937) et membre de l’Oratoire.
Né en 1911, Antonin-Marie Henry est dominicain. Il est nommé en 1942 directeur de La Vie spirituelle et élabore des manuels de théologie.
Né en 1896, fondateur avec le père Daniélou de la collection Sources chrétiennes, il s’intéresse au dialogue avec les autres religions et propose une réflexion sur la modernité occidentale.
Né en 1900, ce dominicain fonde avec les pères Boisselot et Bernadot le journal Sept et dirige La Vie intellectuelle.
Né en 1923, il enseigne la philosophie à l’institution Saint-Jean de Passy. Il est un fidèle des réunions que tenait le philosophe Gabriel Marcel à son domicile.
Né en 1907, ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1926), philosophe personnaliste et professeur de Lettres supérieures à Henri-IV.
Ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1946), philosophe.
Ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1919) historien de la philosophie.
Ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1920) philosophe augustinien.
Ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (promotion 1933).
La réunion du 26 octobre 1949 réunit en outre le père Montuclard directeur de Jeunesse de l’Église, le père Russo, le père Guy de Broglie enseignant à l’Institut catholique de Paris, carton 4, AICP.
Né en 1907, ancien élève de l’École normale supérieure d’Ulm (promotion 1928). Il traduit Heidegger dont il devient l’incontournable spécialiste pendant plus d’une trentaine d’années.
Tel est le cas de la réunion sur l’athéisme de Merleau-Ponty, en 1950, carton 4, AICP.
Projet de travail pour la réunion du 15 juin 1948, 1 p. Papiers Féret, ADF.
Compte rendu du travail, p. 1, carton 4, AICP.
Le statut contemporain de la philosophie première, centenaire de la faculté de philosophie, Beauchesne, 1996, présentation Philippe Capelle, p. 323. L’abbé Colin signale que la Faculté de philosophie reste largement à l’écart de la recherche contemporaine.