b) Expériences de recherches ?

‘"L’auditoire de la Semaine depuis ses débuts, s’est singulièrement agrandi de façon à commander un certain style propre aux réunions à assistance considérable encore qu’elle soit d’une certaine qualité : le travail de haute vulgarisation que le CCIF assume selon cette formule pourrait être menacé d’ankylose si l’effort des orateurs n’est pas appuyé par la critique constructive des spécialistes dans le public (...) leurs interventions permettront ainsi de débattre les idées proposées, de faire ressortir des aspects restés à l’arrière-plan, d’indiquer les lignes de recherche à poursuivre." 568

Une fois encore, ces réunions ont laissé fort peu de traces écrites. En 1953, le chanoine Dondeyne fait un exposé sur "La phénoménologie mène-t-elle à l’athéisme ?" En 1954, trois séances privées sont organisées. En 1955, quatre séances privées reprennent les sujets de la veille. Une soixantaine de personnes représentatives de l’intelligentsia catholique française est invitée : du progressiste Jacques Chatagner 569 au conservateur Louis-Henri Parias 570 . L’année suivante, un pas supplémentaire est franchi lorsque l’équipe décide d’inviter des non-croyants et des protestants : Lucien Goldmann 571 , Alain Touraine 572 , Pierre Burgelin 573 et le pasteur Jean Bosc 574 . Certes, leur place reste modeste et c’est surtout en tant que spécialistes qu’ils sont invités, mais désormais l’habitude est prise de faire appel à des hommes venus d’autres horizons afin d’enrichir la pensée chrétienne. Quelques années plus tard, ce travail au sein des séances privées des Semaines aboutira à l’invitation, cette fois-ci publique, de protestants (Paul Ricœur est ainsi le premier sollicité, en 1958), puis d’agnostiques (à partir de 1959) 575 .

Les séances privées ou les colloques manifestent ainsi le souci constant de l’équipe de répondre à deux demandes bien différentes : une vulgarisation de haut niveau pour un public divers et un pôle fédérateur d’énergies intellectuelles. La mise en place des grandes conférences et de débats moins spéculatifs n’entraîne pas pour autant une neutralisation du discours : les débats, les cahiers et les Semaines donnent clairement des réponses de haute valeur aux questions qui traversent la décennie 1950. Questions politiques, littéraires, philosophiques ou encore économiques passent par le creuset des penseurs catholiques dans une exigence d’obéissance au réel.

Notes
568.

Circulaire, p. 1, "dossier SIC 1955", ARMA.

569.

Journaliste à La Quinzaine puis à La lettre. Ses positions philocommunistes lui valent des difficultés avec la hiérarchie catholique.

570.

Né en 1913, secrétaire de rédaction à La France catholique il est également directeur de la Nouvelle Librairie de France où il publie une Histoire du Peuple français.

571.

Né en 1913, il est une des figures majeures de la sociologie marxiste.

572.

Né en 1925, il travaille sur la société industrielle. Il devient, à partir des années 1960, un des chefs de file de la sociologie.

573.

Philosophe spécialiste de Rousseau et de la temporalité. Il a participé à l’aventure de la revue Dieu vivant. Il joue un rôle dans les instances dirigeantes du protestantisme et travaille au dialogue interreligieux.

574.

Le pasteurJean Bosc est un disciple de Karl Barth, il dirige Foi et vie. Voir en annexe la liste des membres invités aux séances de l’après-midi.

575.

Voir infra.