L’année 1947 avait marqué les débuts de la guerre froide : les premiers éléments de la bipolarisation s’étaient établis lors du discours du président des États-Unis, le 12 mars 1947, manifestant la détermination des Américains à ne pas laisser l’influence communiste se développer dans le monde 773 . La culture dite de guerre froide se met en place avec la sortie en France du livre de Victor Kravchenko, J’ai choisi la liberté et la publication d’Humanisme et terreur de Maurice Merleau-Ponty 774 . A partir de là, ‘"antigaullisme et anticommunisme contribuent donc à structurer une partie des débats entre clercs dans la décennie qui suit la Libération"’ ‘ 775 ’ ‘.’ La propagande constitue désormais une arme essentielle pour chaque camp. Dans ce contexte, l’attitude des intellectuels catholiques est intéressante : participent-ils strictement de cette problématique de guerre froide par le choix des débats, des cahiers ou encore des colloques comme c’est alors le cas pour le plus grand nombre de revues et des interventions intellectuelles de l’époque ? Ou transcendent-ils cette culture par une approche médiane ? La question mérite d’être d’autant plus posée que dans l’après-guerre beaucoup de catholiques sont attirés par le prestige du Parti des fusillés alors que le Magistère romain le considère au contraire comme le plus grand fléau.
Voir "Guerre froide", de Pierre Mélandri, dans 1938-1948, les années de tourmente : de Munich à Prague, dictionnaire critique, Flammarion, 1995, p. 89-95.
Pascal Ory, L’aventure culturelle, op. cit., p. 144-145. Voir pour le courant philocommunisme l’ouvrage de Michel Winock : Le temps de la guerre froide, du rideau de fer à l’effondrement du communisme, Le Seuil, "Points Histoire", 1994, p. 106-107.
Jean-François Sirinelli, "Les intellectuels français au temps de la guerre froide: entre communisme et gaullisme ?", dans Cinquante ans de passion française. De Gaulle et les communistes, Balland, 1991, p. 264.