3.3.2.1 Modèles de signal en information asymétrique simple

Syndicat et employeur négocient le renouvellement d’un contrat stipulant un salaire w0. Le nouveau contrat sera effectif pour une durée T. Le salaire de réservation du syndicat, i.e. ce qu’il recevra pendant la grève (rien, indemnité chômage, fonds de réserve syndical ou salaire concurrentiel) est de connaissance commune, alors que la valorisation du travail y de l’employeur n’est connue que de lui. En revanche, il est de connaissance commune que y est distribuée selon F(.)dont la densité est positive sur [yB,yH]. Le syndicat choisit une menace θ, θ∈{H,G}, θ étant stationnaire. Il peut donc décider soit de faire grève G dès le premier refus , soit de continuer de travailler selon les termes de l’ancien contrat H.

Le paiement de conflit du syndicat est uθ (avec uθ = w0(uθ)), et celui de la firme est v g (y). Cette fonction de paiement est linéaire message URL form37.gif. La différence relative de paiement sous la menace θ est égale à message URL form38.gif et représente ce que paie la firme diminué de ce que reçoit le syndicat et divisé par le coût de la dispute. Quand le syndicat opte pour une option d’attente, cette différence est égale à 0.
L’ensemble des paiements quand intervient un accord est y et l’ensemble des paiements de conflit est message URL form39.gif. L’enjeu de la négociation est le partage de message URL form40.gif, qui est positif tant que message URL form41.gif. Les paiements des joueurs sont égaux à la somme pondérée par la durée du conflit des paiements de conflit et des paiements d’accord. La fraction actualisée de temps perdu dans un conflit de durée t est message URL form42.gif étant le taux d’actualisation. Les paiements totaux des agents sont :
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Après le choix du syndicat de son type de conflit, le jeu est constitué d’une série de propositions et contre-propositions dont la première offre émane du syndicat. Le jeu se termine dès qu’une offre est acceptée. Si Δi est le délai précédant l’offre wi, l’histoire du jeu Hn après n propositions est donnée par message URL form45.gif l’ensemble des délais, des propositions qui ont été faites jusqu’à la date n et le type de conflit choisi. Une stratégie pure de l’employeur est σy. Ainsi message URL form46.gif représente l’ensemble des stratégies des joueurs.

Une issue du jeu se caractérise par trois éléments : la date à laquelle l’accord intervient, le salaire qui prévaut alors, et le type de conflit qui a précédé l’accord.

Deux niveaux de valeurs sont à remarquer puisqu’ils conditionnent les différents cas de figure du jeu. Tout d’abord, le choix du type de conflit dépend du niveau de w0. Le seuil que l’ancien contrat doit atteindre pour que le syndicat ne choisisse pas la grève sera noté w’. Lorsque w0>w’, le syndicat ne choisira pas la grève. Ce seuil dépend de r, T, F ainsi que des paiements du conflit. Il est ensuite possible de définir un seuil m correspondant à la croyance du syndicat sur la valorisation du travail ; cette dernière étant induite par la première offre du syndicat et correspondant à la situation où wS1 est acceptée. Il est possible alors d’en déduire que m≥y.

Cramton &Tracy (1992) montrent qu’il existe un équilibre bayesien parfait. Dans ce cas, le syndicat offrira immédiatement message URL form47.gif (le syndicat ne disposant pas d’information privée n’a aucun intérêt à différer sa proposition), m(cg) est défini par la maximisation de l’espérance de gain du syndicat, message URL form48.gif.
La firme acceptera l’offre du syndicat si y>m et dans le cas contraire, attendra message URL form49.gif pour offrir un salaire message URL form50.gif que le syndicat acceptera immédiatement. Cette dernière offre correspond à la solution de Rubinstein. Si la première évaluation du type de la firme par le syndicat dépasse la vraie valeur de y, la firme observera un délai avant de faire une contre-proposition qui sera automatiquement acceptée, puisque la firme, par l’importance du délai qu’elle choisit, aura révélé l’intégralité de son information privée. Le délai entre les offres apparaît donc comme un signal. L’incidence message URL form51.gif du conflit diminuent lorsque la perte liée au conflit (cg) croît ainsi que lorsque la productivité et les valeurs limites des croyances du syndicat au sujet de la productivité augmentent.
Cramton & Tracy mettent en évidence le fait que la durée et l’incidence d’un conflit peuvent être indépendantes du type de conflit choisi par le syndicat. En effet, dans le cas où bG=uG, par exemple si la production continue avec des salariés intérimaires et si les grévistes ont tous trouvé un emploi correspondant au salaire non syndical, la durée et l’incidence du conflit sont indépendantes de la menace exercée, du salaire pratiqué avant négociation dans l’entreprise et du coût du conflit. Dans ce cas, la durée du conflit est égale à message URL form52.gif avec m argument du maximum de l’utilité espérée du syndicat. Une baisse du salaire d’équilibre proportionnelle au coût du type de conflit choisi est constatée. La grève étant plus coûteuse que l’option d’attente, la baisse du salaire d’équilibre sera plus importante pour une grève. Il est alors nécessaire de se demander quelles sont les conditions qui détermineront le choix de menace du syndicat. Le syndicat décidera de faire grève si message URL form53.gif avec message URL form54.gif Dans le cas inverse, le syndicat choisira l’option d’attente. Ceteris paribus, les grèves seront plus fréquentes si le salaire antérieur à la négociation est dévalorisé par une période d’inflation, si le taux de chômage a baissé ou si la profitabilité de l’entreprise a augmenté.

L’employeur peut ainsi décider unilatéralement d’augmenter le salaire avant que la négociation ne débute, et essayer ainsi de bloquer la menace de grève. Pour que cette solution soit efficace, il ne faut pas qu’une telle hausse de salaire conduise le syndicat à conclure que la profitabilité de l’entreprise est élevée. Dans le cas où cette décision est neutre vis à vis des croyances du syndicat, Cramton &Tracy montrent qu’augmenter les salaires ne conduit pas toujours à annihiler toute menace de grève. L’indexation du salaire sur l’inflation est selon eux une bonne méthode pour éviter les grèves et réduire le coût de renégociation, mais cette option augmente le coût des salaires futurs à verser.