2.6 LE PARTENARIAT ENTRE FAMILLE ET EQUIPE EDUCATIVE

Il nous faut à présent justifier notre référence à la notion de partenariat en la précisant par rapport à d'autres telles que la collaboration, la coopération et la concertation. Puis, nous envisagerons les ressources d'une relation de cette nature entre famille et équipe éducative ainsi que ses limites.

La relation entre la famille et le dispositif de suppléance familiale est toujours inégalitaire, comme le souligne justement Paul Durning 160 . En effet, la première se trouve face à une organisation souvent extrêmement complexe. Elle subit également une inégalité de légitimité car sa difficile relation avec l'adolescent n'est pas de nature à susciter une attitude favorable à son égard 161 . " ‘Le travailleur social, s'interroge Danièle Minois, est-il prêt à accepter la famille comme un partenaire ou au contraire la considère-t-il comme un usager ?"’ 162 . Pour l'équipe éducative, concrétiser l'esprit de suppléance familiale signifie permettre à la famille et, plus particulièrement aux parents, de continuer à participer au développement de l'adolescent.

A propos des relations entre enseignants et parents d'élèves, Jean Kellerhals et Cléopâtre Montandon 163 ne distinguent pas la coopération de la collaboration et, " ‘la coopération va, selon Jean-Marie Miron, plus loin que la collaboration ; elle suppose le partenariat et se traduit par le partage des tâches et des responsabilités. Dans le partenariat et la coopération, il y a réciprocité dans les décisions. Cette réciprocité est différente de la collaboration où il s'agit de la réalisation d'une tâche. La concertation est un échange d'idées préalables à la collaboration’ " 164 . Paul Durning précise la distinction faite par les auteurs québécois entre la coopération qui " ‘supposerait une recherche d'entente sur la mise en oeuvre des moyens", et le partenariat qui "supposerait en outre une définition conjointe par les partenaires des objectifs à atteindre puis des moyens à mettre en oeuvre’ " 165 .

De son côté, Jean-Marie Bouchard 166 présente trois modèles éducatifs : un premier dit "rationnel" selon lequel le professionnel s'en tient à son rôle d'expert et impose sa décision aux parents ; un deuxième qualifié d'"humaniste" selon lequel le professionnel aide les parents à rechercher une solution ; un troisième dit "symbiosynergique", fondé sur le partenariat, " ‘impliquant pour le professionnel (partenaire) d'inviter les parents à assumer un rôle de partenaires en cherchant ensemble les solutions et en partageant les décisions qui les concernent".’

Ces différentes références nous incitent à privilégier la notion de partenariat pour envisager les conditions favorisant la mise en oeuvre d'une action éducative fondée sur la suppléance en non sur la substitution.

Notes
160.

DURNING, P. (1992). L'enfant, enjeu des interactions entre familles naturelles, milieu de suppléance familiale et travailleurs sociaux. Communautés éducatives, 80. p. 57.

161.

APPELL, G., PONCET, F. (1983). Institution, enfants, parents : témoignages et réflexions. Perspectives psychiatriques, n° 90. p. 44.

162.

MINOIS, D. et al. (1985). Relations travailleur social-famille : analyse d'une pratique. Sauvegarde de l'enfance, 1-2. p. 178.

163.

KELLERHALS, J., MONTANDON, C., et al. (1991). Les stratégies éducatives des familles. Milieu social, dynamique familiale et éducation des préadolescents. Paris : Delachaux et Niestlé, cités par DURNING, P. (1995). op. cit. p. 199.

164.

MIRON, J-M. (1998). op. cit. p. 59.

165.

DURNING, P. (1995). op. cit. p. 198.

166.

BOUCHARD, J-M. (1989). Intervention professionnelle et modèle éducatif des parents. In POURTOIS, J-P. (sous la direction de). Les thématiques en éducation familiale. Bruxelles : De Boeck, cité par FABLET, D., MACKIEWICZ, M-P. (1996). Les modalités de coopération entre professionnels et parents d'enfants placés dans les pouponnières à caractère social. Rapport de recherche, MIRE-DEP, tome 1. p. 16.