DEUXIEME CHAPITRE
L'EXERCICE D'UN POUVOIR D'AGIR, AU COURS D'UNE DECISION

Une décision constitue un moment privilégié pour favoriser l'exercice d'un pouvoir d'agir. A l'instar de Vincent Lemieux 410 qui considère le pouvoir comme la possibilité de ‘"transformer un choix en une décision’ ", William A. Ninacs 411 postule que l'exercice du pouvoir " ‘repose sur une capacité de choisir, sur une capacité de décider en fonction du choix et, en fin de compte, sur une capacité d'agir en fonction de sa décision. Le développement de ces capacités constitue le processus d'empowerment’ ". Nous ne limitons pas le processus de pouvoir d'agir à la mise en oeuvre, par la personne, de sa compétence à prendre une décision, mais considérons cette compétence comme une des composantes de ce processus.

Lors d'une décision, quelle que soit sa portée, l'adolescent, ses pairs, les membres de sa famille, ses parents en particulier, ont l'opportunité de profiter du dispositif de suppléance familiale pour l'élaborer, la mettre en oeuvre et l'évaluer dans des conditions différentes de celles qui précédaient la mise en place de ce dispositif. En effet, lorsque l'adolescent vivait dans sa famille, ses difficultés se manifestaient couramment par une incapacité, pour lui et ses proches, à négocier, à déterminer des choix sans les imposer par la force, et à les mettre en oeuvre. L'on sait que l'exercice de ces activités tient une place primordiale dans la construction de l'adolescent, en particulier dans l'aménagement de ses relations avec sa famille et son environnement.

Comme nous l'avons exposé dans le chapitre précédent, nous distinguons les moments susceptibles de favoriser l'exercice d'un pouvoir d'agir dans le groupe d'adolescents et ceux susceptibles d'autoriser une telle dynamique au sein de la famille. Nous limitons cette recherche à l'étude des décisions susceptibles de favoriser un processus de pouvoir d'agir dans ce second cadre, et qualifions de "personnelles" les décisions étudiées, pour les distinguer des décisions collectives. Sont donc concernés l'adolescent, sa famille, plus particulièrement ses parents, l'équipe éducative, et éventuellement, ses pairs.

Nous présentons ci-après les différents points de vue qui, de proche en proche, nous conduiront à la formulation de l'hypothèse. Nous réduisons également aux parents l'étude du pouvoir d'agir susceptible d'être exercé au sein de la famille. Nous envisageons donc successivement le caractère synergique de cette dynamique, la nature du pouvoir de l'adolescent, de celui de ses parents et de celui des membres de l'équipe éducative, ainsi que les articulations entre ces différents pouvoirs.

Notes
410.

LEMIEUX, V. (1989). Le pouvoir dans la réalisation des politiques sociales. Service social, Vol. 38. p. 181.

411.

NINACS, W. A. (1995). op. cit. p. 76.