4.2.2 La prise en compte d'une préoccupation personnelle par la collectivité

La notion de pouvoir d'agir amène les membres de l'équipe éducative à n'imposer ni un ordre du jour ni leur point de vue. Il est clair que les parents fuient les réunions "moralisantes" ou étrangères à leurs préoccupations, où ils se sentent noyés sous des propos pré-établis. A ce titre, nous ne partageons donc pas l'avis de Pierre Verdier qui préconise que les organismes de contrôle n'approuvent ni les budgets ni les projets non soumis à l'avis du conseil d'établissement. Cette proposition d'administrateur méconnaît les préoccupations des parents.

Au cours du conseil d'établissement, l'équipe de l'institution est responsable de la mise en oeuvre des conditions susceptibles de favoriser l'exercice d'un pouvoir d'agir par les adolescents et leurs parents. Les éducateurs ont l'opportunité de mettre à profit les réunions et éventuellement les temps individuels pour motiver les adolescents à prendre part aux travaux du conseil. Pour les parents, seuls des contacts individuels sont envisageables avant l'organisation d'un temps collectif. L'équipe éducative met en oeuvre la notion de pouvoir d'agir :

L'organisation des vacances constitue un thème susceptible d'être traité au sein de cette instance. Les activités proposées aux adolescents pendant les périodes de congés intéressent directement leurs parents. Or, ceux-ci ne sont jamais conviés à prendre part à l'élaboration des projets, mais seulement informés de leurs contenus lorsqu'ils sont déterminés par l'équipe éducative ou par les adolescents. De telles pratiques postulent que les parents ne sont pas capables de prendre part à la construction du projet, que leur participation est inutile ou qu'elle crée un obstacle. En outre, certains parents ont besoin d'être épaulés dans l'organisation de leurs propres vacances et désirent partager ces temps avec leur enfant dont ils sont séparés. Nous avons constaté les efforts déployés par la mère de Thomas pour accueillir quelques jours son fils au début de l'été. Renonçant à un projet de camping, elle s'est donnée beaucoup de mal pour obtenir une chambre plus spacieuse et accueillir son fils au FJT dans lequel elle résidait. Le conseil d'établissement a la vocation de fonder un lieu permettant d'aborder de telles situations et de provoquer un échange des expériences parentales.

En conclusion, nous pouvons affirmer que les équipes éducatives ne sont pas parvenues, dans leur grande majorité, à mettre en place le conseil d'établissement car elles n'ont pas su identifier son bien-fondé et sa légitimité. L'éloignement, le "turn over", le rapide désintérêt des familles ne sont, nous semble-t-il, que des pseudo-justifications des dysfonctionnements de cette instance. En envisageant cette instance comme un espace favorisant une synergie des pouvoirs, l'institution ne craint pas un affaiblissement du sien par l'accroissement de celui des adolescents et de leurs parents. A partir de leurs situations et points de vue, les familles sont en mesure d'énoncer des suggestions novatrices. Les actions retenues en conseil d'établissement complètent celles engagées par l'équipe auprès de chaque famille et s'avèrent indispensables pour mener à bien le projet éducatif mis en oeuvre dans le cadre du dispositif de suppléance familiale.