§ 2 : L’organisation du pouvoir dans les sociétés multinationales ou dans les groupes de sociétés.

55. Les entreprises transnationales et les groupes de sociétés ont adapté leur organisation interne à l’environnement économique.

Dans un but de rationalisation du pouvoir ces entreprises ont mis en place une organisation dite ’’multidivisionnelle’’ 242 . La direction de la firme est organisée en unités fonctionnelles. Chacune a charge d’un secteur défini, finance, ressources humaines, relations extérieures. S’ajoutent les divisions opérationnelles par secteurs d’activité.

L’autonomie décisionnelle dont dispose les divisions permet de fragmenter le traitement des informations, ce qui favorise une prise de décision plus rapide. Les directeurs administratifs, techniques ou commerciaux qui dirigent ces unités sont des salariés. Cadres supérieurs, ils détiennent une partie du pouvoir de direction et échappent en général aux dispositions de la convention collective en ce qui concerne la fixation de leur salaire. Aussi, peut-on se demander avec G. Lyon-Caen si la qualité de salarié ne devrait pas être exclue au profit de celle de mandataire social dès lors que le cadre possède le pouvoir de répartir les profits en négociant avec les syndicats, en souscrivant un emprunt bancaire ou encore en décidant des achats d’équipements. Selon cet auteur, chaque membre de l’état-major d’une grosse société, dont font partie les directeurs de divisions, ’’devrait ipso jure devenir mandataire social’’ dans la mesure où ’’ils sont les maîtres de l’entreprise’’ 243 . En effet, ces titulaires du pouvoir de direction ont la qualité juridique de travailleurs salariés sans être subordonnés, c'est-à-dire sans être soumis à un ordre dans la prestation de travail.

Ces divisions, qui agissent comme des ’’quasi firmes’’ 244 , restent cependant sous la dépendance de la société-mère. En prenant des participations dans les entreprises du groupe, celle-ci contrôle leur activité et décide de la stratégie commerciale et financière.

Cette organisation, qui reste marquée par la propriété du capital social des divisions par la société mère et par la centralisation des décisions fondamentales, est remise en cause 245 . Face à une demande évolutive et exigeante, les groupes de sociétés développent des réseaux de coopérations, des alliances commerciales financières et technologiques. De la nécessité de s’adapter rapidement aux exigences du marché tout en améliorant sa compétitivité est née la firme-réseau 246 . Celle-ci se caractérise par des relations contractuelles et financières, ’’qui permettent de déconcentrer et décentraliser une partie des activités, sans perdre d’autre part le contrôle des collectifs de travail éparpillés’’ 247 . La firme-réseau se compose de filiales, de sous-traitants et de partenaires privilégiés. Sur les sociétés membres du réseau, la société-mère détient un pouvoir économique et financier sans pour autant recourir à leur intégration par la filialisation.

Notes
242.

Voir D. Uzunidis, S. Boutillier, Le travail bradé, L’Harmattan, Collection Economie et innovation, 1997, p.93.

243.

G. Lyon-Caen, Quand cesse-t-on d’être salarié ?, op. cit.

244.

J. L. Gaffard , Economie industrielle et de l’innovation , Précis Dalloz, Paris, 1990, p.327.

245.

Voir A. Andreff, Les multinationales globales, Paris, Repères, La Découverte, 1995.

246.

M. Castells., La société en réseaux ,trad.française, Paris, Fayard, 1998.

247.

Voir D. Uzunidis, Mondialisation, intégration et normalisation du progrès technique, Innovations, Cahier d’économie de l’innovation, n°3, Paris, L’Harmattan, 1996.