§ 1 : Les structures de l’entreprise.

62. L’employeur décide de la forme juridique et l’organisation technique de l’entreprise. Il choisit, sous réserve du respect des règles du droit des sociétés, la forme juridique du groupement. De ce choix vont dépendre les règles de fonctionnement et de contrôle de la société. Ainsi concernant les sociétés anonymes, l’employeur peut opter, soit pour la formule classique avec conseil d’administration et président, soit pour la formule duale à directoire et conseil de surveillance. Cette dernière option n’est choisie que par une minorité de sociétés 259 .

Les règles du droit de travail s’appliquent, pour la plupart, quelle que soit la personne de l’employeur, personne physique ou morale, et dans cette hypothèse, quel que soit le type de groupement choisi. Certaines, cependant, dépendent de la forme juridique de l’entreprise comme, par exemple les règles de la représentation du comité d’entreprise au conseil d’administration ou au conseil de surveillance des sociétés par actions.

L’employeur décide également des structures matérielles de l’entreprise. Celle-ci peut être située sur un seul lieu géographique ou bien être éclatée en plusieurs établissements. Alors que la petite entreprise ne comporte qu’un établissement, la grande entreprise compte souvent plusieurs agences, usines ou succursales.

La législation du travail a pour domaine d’application l’établissement. Ainsi, les dispositions relatives à l’hygiène et la sécurité 260 , à la durée du travail 261 ou bien celles concernant la mission de contrôle de l’inspection du travail 262 visent l’établissement. On a donc pu écrire que ’’la véritable cellule du Droit du travail est non pas l’entreprise, mais l’établissement’’ 263 .

Le choix des structures matérielles a une incidence sur l’exercice des droits collectifs des salariés. En effet, les ’’seuils d’effectifs’’ 264 de l’entreprise déterminent l’étendue des droits des salariés.

Ainsi, le régime des institutions représentatives du personnel n’est il applicable que lorsque l’entreprise ou l’établissement dépasse un certain seuil (au moins 50 salariés pour les comités d’entreprise et au moins 11 salariés pour les délégués du personnel). Il peut alors être tentant pour l’employeur de s’appuyer sur des impératifs économiques pour diviser son entreprise en plusieurs établissements n’atteignant pas ces effectifs, afin de mettre en échec les dispositions légales. La loi prévoit des sanctions à l’égard des employeurs qui utilisent de tels stratagèmes. Les articles L.482-1 et L.483-1 du code du travail répriment, en effet, toute entrave apportée à la désignation des délégués du personnel et à la constitution du comité d’entreprise et prévoient des peines correctionnelles. Cependant, les motifs avancés par l'employeur sont parfois difficilement contrôlables et il est alors délicat de savoir si l'employeur a voulu ou non éluder les obligations que la loi lui impose à l'égard de son personnel. Ceci étant, ces agissements frauduleux ne sont guère concevables que dans les petites entreprises. Le second terrain d’élection du pouvoir patronal d’organisation est l’organisation de la production.

Notes
259.

Voir D. Hurstel, Est-il urgent et indispensable de réformer le droit des sociétés au nom de la corporate governante ?, Rev. Sociétés, 1995, p.633 (moins de 2% des sociétés anonymes ont adopté la forme duale).

260.

Livre II, Titre III, C. trav., art. L.230-1 et suiv.

261.

Livre II, Titre I, C. trav., art. L.212-1 et suiv.

262.

Livre VI, Titre I, C. trav., art. L.611-1 et suiv.

263.

G. Lyon-Caen, L’entreprise dans le droit du travail, op. cit.

264.

C. Sachs, Les seuils d’effectifs, LGDJ, 1985.