§ 2 : Les recours contentieux.

164. Le juge administratif est seul compétent pour contrôler la légalité d’une décision administrative, mais son pouvoir se limite à ce contrôle. Le contentieux de l’annulation d’une décision administrative se ramène essentiellement au recours pour excès de pouvoir 613 .

Celui-ci peut être formé sans ministère d’avocat et par toute personne ayant intérêt à agir contre la décision administrative lui faisant grief. Le contrôle du juge administratif est très étendu. Celui-ci ne se contente pas de rechercher si la décision est entachée d’erreur de droit ou d’erreur manifeste d’appréciation. Il apprécie l’adéquation de la décision aux faits. Ainsi se prononce-t-il indirectement sur la gravité des fautes reprochées au salarié protégé ou sur la pertinence du motif économique motivant le licenciement. De même, contrôle-t-il si les atteintes aux droits des personnes contenues dans le règlement intérieur sont bien justifiées par la tâche à accomplir et proportionnelles au but recherché.

165. Ce contrôle des dispositions du règlement intérieur par le juge administratif ne fait pas obstacle à l’intervention des juridictions judiciaires. Celles-ci peuvent, en effet, être saisies d’une demande visant à obtenir l’annulation d’une sanction pour manquement à une disposition du règlement intérieur dont la légalité est contestée par le requérant. Dans cette hypothèse, le juge judiciaire est compétent pour se prononcer sur la licéité du règlement intérieur. S’il décide d’écarter ’’une clause contraire aux articles L.122-34 et L.122-35, une copie du jugement est adressée à l’inspecteur du travail et aux représentants du personnel’’ (article L.122-37 al. 3 du code du travail). Il peut aussi être saisi d’une demande principale en annulation de certaines dispositions du règlement intérieur. Les dispositions légales soumettant le règlement intérieur au contrôle administratif ne lui ôte pas sa nature d’acte juridique de droit privé 614 et, par conséquent, l’autorité judiciaire est compétente pour en apprécier la validité.

Cependant, la Cour de cassation limite la compétence du juge judiciaire aux seules clauses n’ayant fait l’objet d’aucun contrôle administratif 615 . La distinction opérée entre les dispositions du règlement intérieur est discutable juridiquement étant donné l’exclusivité de la compétence judiciaire pour statuer sur la validité des actes de droit privé 616 . Il s’agit ici de l’application des principes de répartition de compétence entre juridiction administrative et juridiction judiciaire.

Ceux-ci imposent parfois au juge administratif de surseoir à statuer. Lorsque la solution du litige qui lui est soumis dépend de la solution d’autres questions relevant de la compétence du juge judiciaire, deux hypothèses doivent être envisagées. Soit la question posée ne soulève aucune difficulté sérieuse et le juge administratif peut statuer, soit la difficulté soulevée est sérieuse et il est alors tenu de renvoyer à l’autorité judiciaire l’examen de la question préjudicielle.

La compétence de la juridiction administrative dans les rapports de travail de droit privé est réduite depuis la loi du 30 décembre 1986 qui a supprimé l’autorisation administrative de licenciement. En matière de litiges du travail, la compétence appartient le plus souvent au conseil des prud’hommes.

Cependant, le contentieux peut aussi être porté devant le juge répressif, le tribunal d’instance, le tribunal de grande instance ou encore le tribunal de commerce. Face à cette diversité des recours en droit du travail, porteuse de complexité pour le plaideur, des réformes sont proposées afin de rassembler l’ensemble du contentieux social 617 , notamment la constitution d’un ’’ordre juridictionnel social’’ 618 .

Notes
613.

Voir R. Chapus, Droit du contentieux administratif, 8ème éd., Montchrestien, 1999, p.178 et suiv.

614.

Cass. Soc., 16 décembre 1992, D. 1993, p.334, note X. Prétot ; Dr. soc., 1993, p.267,
note A. Jeammaud.

615.

Cass. Soc., 16 décembre 1992, op. cit.

616.

Voir A. Jeammaud, note sous Cass. Soc., 16 décembre 1992, op. cit.

617.

Voir Y. Saint-Jours, revue française des affaires sociales, 1993, n°1, p.87 ; A. Supiot, L’impossible réforme des juridictions sociales, revue française des affaires sociales, 1993, n°1, p.97

618.

Y. Saint-Jours (sous la direction), La perspective d’un ordre juridictionnel social, Presse univ. Perpignan, 1994.