3- La prévention : un moyen de rassurer

Nous commencerons par ce simple constat : la prévention du jeu pathologique en France n'existe pas. Même si la maladie du jeu est reconnue, les pouvoirs publics pensent qu'elle ne concerne qu'une minorité tellement infime qu'elle n'a pas lieu d'être un sujet de préoccupation. A l'heure d'aujourd'hui, aucune étude de prévalence n'a été réalisée qui permettrait de confirmer ou de contester cette affirmation. Pour l'instant, seuls les dirigeants des casinos commencent à tirer la sonnette d'alarme (tout en disant que les cas restent quand même isolés). La charte de déontologie des casinos appartenant au Syndicat des Casinos de France consacre quelques lignes au danger que peut représenter le jeu pour certains joueurs et préconise quelques mesures préventives. En revanche, des pays comme les États-Unis ou le Canada ont des unités spécialisées (sous forme d'unités de recherche privées ou publiques, d'associations) qui s'occupent de la prévention. La prévention du jeu pathologique est organisée sous le même modèle que celle des addictions à substance comme l'alcool par exemple. Des campagnes d'information et de communication sont mises en place sous forme de dépliant ou d'affichage publique. Le rôle de la prévention est de considérer le problème au départ pour pouvoir en contrôler les conséquences. Elle permet aussi de rassurer la population dans des pays où le jeu pathologique et ses représentations restent des peurs ancrées profondément. Il est assez intéressant de voir qu'aux États-Unis et au Canada, de nombreux groupes de casinos participent activement à la prévention. La question est de savoir si cette action ne se mesure qu'en termes de bénéfice d'image ou si c'est réellement dans un but philantropique, social ou politique.

La société des casinos du Québec a ainsi mis en place une politique complète de prévention du jeu pathologique à travers une charte, reprise dans un document officiel. Elle subventionne un programme de recherche dirigé par Robert Ladouceur à l'université Laval dont un axe, sur les quatre développés ²⁹⁴ , est consacré uniquement à la prévention. La politique de la société des casinos du Québec (filiale de Loto-Québec) se définit ainsi : "‘Dans le cadre de l'implantation des casinos au Québec, il y a lieu pour la société des casinos du Québec inc. de se doter d'une politique de prévention du jeu pathologique et de prévoir une série de mesures dans ce domaine’" ²⁹⁵ . Les objectifs principaux sont, dans un premier temps, d'informer, c'est à dire de mettre en place des systèmes d'information par le biais de supports divers, et dans un deuxième temps de former des gens à reconnaître les signes de la maladie pour mieux cibler les joueurs susceptibles d'avoir besoin d'aide. L'implication du personnel dans les casinos est essentielle pour le fonctionnement de ce système. Leur rôle est de dépister les joueurs pathologiques potentiels et des les aiguiller sur un service spécialisé (l'anonymat est préservé). Des mesures ont été aussi mises en place comme la procédure d'auto-exclusion, la mise à disposition d'une brochure d'information sur le jeu pathologique à l'intérieur du casino et d'une ligne d'aide au joueurs. L'accès aux mineurs, les crédits aux joueurs, l'alcool dans les aires de jeu sont interdits. La société des casinos du Québec s'engage aussi à travers ses campagnes publicitaires à faire attention à ce que celles-ci ne favorisent pas le développement du jeu pathologique. Ce programme de prévention est, comme pour d'autres addictions, un moyen d'essayer de réduire sinon d'éliminer les risques liés au jeu. C'est aussi, pour la société Loto-Québec, une manière de montrer qu'elle a conscience du problème et qu'elle cherche des solutions. Cette implication lui permet de se réhabiliter auprès des publics qui l'accusent de ne faire qu'empocher les bénéfices du jeu sans en assumer les coûts sociaux.