b- La conférence de presse du 21 décembre 1995 et son traitement médiatique

1- La conférence de presse

Monsieur Henri Chabert, maire du 6e arrondissement a donné une conférence de presse à l'issue du conseil municipal du 21 décembre 1995. Le sujet de cette conférence portait sur la construction d'un casino dans le projet d'hôtel de la cité internationale de Lyon.

Elle comprenait 6 parties :

  • l'intérêt pour l'hôtel de comprendre un casino ;
  • l'intérêt de Lyon d'avoir un casino intra-muros ;
  • le type de clientèle attendu ;
  • la respectabilité des casinos ;
  • l'emplacement prévu pour le casino dans l'hôtel de la cité internationale ;
  • une "exclusivité" sur Lyon pour le futur exploitant.

Les deux premières parties insistaient sur les enjeux économiques liés à l'implantation d'un casino dans la ville de Lyon. Pour l'exploitant, cela lui permettrait de rentabiliser l'hôtel. Pour Lyon, qui possède tous les critères nécessaires selon la loi du 5 janvier 1988, le casino qui est un des premiers contribuables d'une ville (la taxe sur le produit brut des jeux va jusqu'à 15%) contribuera fortement au développement local. En outre, c'est un employeur non négligeable. C'est aussi un lieu d'animation pour la ville. Selon la loi de 1959, rappelée à cette occasion, un casino comporte 3 types d'activité distinctes : la restauration, les jeux et l'animation culturelle ou spectacles musicaux (5% du produit brut des jeux peuvent y être consacré). C'est aussi un atout supplémentaire pour le tourisme d'affaires.

Dans une troisième partie, sur la clientèle, Henri Chabert, a souligné le fait que c'est une clientèle différente du passé qui vient jouer aux machines à sous. Il décrit les machines comme "un loisir à faible coût" qui attire toutes les catégories socio-professionnelles et de toutes les classes d'âge au-dessus de 18 ans (chose sur laquelle il a insisté avec les contrôles à l'entrée).

Les trois dernières parties étaient centrées sur la respectabilité du lieu et de ses dirigeants. L'actionnariat du casino et les employés sont soumis à un contrôle très strict de la part du ministère de l'intérieur. La cotation en bourse de la plupart des groupes propriétaires des casinos est une assurance supplémentaire d'un contrôle financier serré. Le blanchiment d'argent est ainsi impossible pour les casinos. L'exploitation des machines est elle aussi très surveillée, ceci pour éviter la fraude.

Enfin dans la dernière partie, le maire justifie l'exclusivité de 20 ans qui sera donnée à l'investisseur pour la construction du casino et de l'hôtel. “Qui s'en plaindra ? On voit mal comment Lyon pourrait accueillir deux casinos à la fois”.

Sur cette conférence de presse, nous remarquons que le maire reprend exactement le même type d'argumentation que les dirigeants politiques ou publics pour la légalisation des casinos à Atlantic City. Les arguments sont de type économique et insistent sur l'apport financier d'un tel établissement aux finances publiques de la ville. L'image des jeux de casino est ainsi réhabilitée et les transforme en loisir socialement acceptable. Nous pouvons remarquer aussi que la promesse de contrôle très stricts sur l'âge, le personnel, les dirigeants, mais aussi sur les comptes du casino sont destinés à rassurer les oppositions morales ou d'accusation d'association au banditisme que pourrait rencontrer ce projet. Une question d'un journaliste, suite à la conférence de presse, portera sur le fait de savoir si les habitants “bourgeois” du 6e arrondissement ne vont pas être choqués par la construction d'un casino et par le nouveau voisinage que celui-ci allait amener. Henri Chabert rétorque que c'est le moyen de faire avancer ce projet de la cité internationale qui est en stagnation par manque de fonds d'investisseurs. En outre "il faut voir ce qu'il y a derrière ce casino, ça n'est pas un casino, établissement, hôtel, en tant que tel, mais c'est un casino implanté dans un hôtel, je crois que l'image est tout à fait différente. Pour prendre l'exemple d'Annecy on ne sait pas toujours qu'il y a un casino à l'intérieur de l'hôtel. La prudence, on l'a détaillée précédemment dans l'ensemble des mesures : loi Sapin, réglementation des jeux par le ministère de l'intérieur. Je ne suis pas sûr que l'implantation d'un casino soit plus dangereuse en termes de population locale que l'implantation de certains établissements moins contrôlés comme les boîtes de nuit. En plus le boulevard des Belges est assez loin". Cette remarque est intéressante car du fait de son implantation dans un hôtel, le casino changerait de statut et relégitimerait son image. D'ailleurs Henri Chabert insiste sur cette différence de statut entre le casino, lieu qui existe par lui-même, et qui a une connotation négative, et le casino au sein d'un hôtel qui prend une image positive puisqu'il se transforme en atout au sein d'une structure pour attirer plus de clientèle.