1.3. Les cellules ganglionnaires

Les cellules ganglionnaires présentent de nombreuses caractéristiques qui les distinguent les unes des autres. La première particularité des cellules ganglionnaires concerne leur champ récepteur. Un champ récepteur correspond à la portion de l'espace à laquelle le neurone est susceptible de répondre. Les champs récepteurs des cellules ganglionnaires sont de forme circulaire et présentent deux zones distinctes, une zone centrale et un pourtour (Tessier-Lavigne, 1991). Ces zones ont une activité antagoniste. On distingue deux groupes de cellules : les cellules à centre "on" et les cellules à centre "off" (Imbert, 1983).

Les cellules à centre "on" vont être activées par la projection d'un point lumineux sur leur centre et inhibées par la projection d'un point lumineux sur le pourtour de leur champ récepteur nommé "off". Inversement, les cellules à centre "off" vont être inhibées par la projection d'un point lumineux sur leur centre et activées par la projection d'un point lumineux sur le pourtour de leur champ récepteur nommé "on" (Livingstone & Hubel, 1988). Compte tenu de l'antagonisme des réponses engendrées par une stimulation du centre ou du pourtour de leurs champs récepteurs, les cellules ganglionnaires répondront mieux à un signal lumineux localisé dans l'espace qu'à un signal diffus se projetant à la fois sur le centre et le pourtour du champ récepteur (Tessier-Lavigne, 1991). Les réponses différenciées en fonction du type de champ récepteur (à centre "on" ou "off") permettent de signaler une diminution ou une augmentation rapide de la luminosité. Par ailleurs, le taux d'excitation des cellules ganglionnaire varie en fonction de la différence d'intensité de lumière projetée sur le centre et le pourtour de leurs champs récepteurs et fournit ainsi une information concernant le contraste.

Les cellules ganglionnaires à centre "on" ou "off" se subdivisent en deux groupes distincts : les cellules ganglionnaires de type "alpha" et les cellules ganglionnaires de type "bêta" (Leventhal, Rodieck, & Dreher, 1981 ; Rodieck & Watanabe, 1993). Il existe un troisième groupe de cellules : les cellules "gamma" (Rodieck & Watanabe, 1993). Ces cellules représentent 10 % de la population totale des cellules ganglionnaires et sont très mal connues (Bullier, 1998). Pour cette raison, nous ne les détaillerons pas.

Les cellules alpha et bêta se distinguent par de nombreuses caractéristiques. Les cellules alpha ont un corps cellulaire et un champ récepteur relativement larges, elles répondent de façon transitoire aux stimulations visuelles et transmettent rapidement l'information (Imbert, 1983 ; Schiller & Malpeli, 1978). Ces cellules sont activées indifféremment par les cônes répondant aux longueurs d'ondes des couleurs verte et rouge, ce qui, d'une part, les rend insensibles aux contrastes de couleur mais d'autre part, leur permet de répondre à une large gamme de longueurs d'ondes. Compte tenu de cette dernière caractéristique, les cellules alpha sont aussi appelées cellules à larges bandes ("broad-band cells" ; Schiller & Logothetis, 1990). Ces cellules ne reçoivent probablement pas d'afférences en provenance des cônes sensibles à la couleur bleue en raison de la spécificité de ces derniers à ne répondre qu'à la couleur (Gouras, 1991).

Les cellules bêta ont un plus petit corps cellulaire et un plus petit champ récepteur. Elles répondent de façon soutenue aux stimulations visuelles et présentent une conduction plus lente que les cellules alpha (Imbert, 1983 ; Schiller & Malpeli, 1978). Par ailleurs, contrairement aux cellules alpha les centres des champs récepteurs des cellules bêta ne reçoivent des afférences qu'en provenance d'un type de cônes, le pourtour recevant, quant à lui, des afférences des autres types de cônes (Gouras, 1991). Pour cette raison, les cellules bêta sont aussi appelées cellules à couleurs opposées ("color-opponent cells" ; Schiller & Logothetis, 1990).

Les axones des cellules ganglionnaires alpha, bêta et gamma vont ensuite se regrouper pour former le nerf optique au niveau d'un point localisé dans la partie postérieure de l'oeil que l'on nomme le disque optique ou encore la tache aveugle car il ne contient pas de photorécepteurs (Barr & Kiernan, 1993).