1.1.1. Effets des lésions pariétales

Dans l'étude de Pohl (1973), les lésions pariétales étaient très étendues et couvraient à la fois le lobe pariétal postérieur et l'aire MT du cortex visuel extra-strié (aire pariéto-préoccipitale). Mishkin, Lewis, et Ungerleider (1982) ont voulu savoir si les déficits dans la tâche d'encodage des relations spatiales dépendaient d'un site plus précis. Pour cela, ils ont délimité trois secteurs de tailles sensiblement égales au sein de l'aire pariéto-préoccipitale. Ils ont ensuite pratiqué des lésions de l'un, de deux, ou des trois secteurs chez différents singes. L'observation des performances des animaux après lésion les a amenés à conclure que la sévérité des déficits observés dans les tâches d'encodage des relations spatiales ne dépendait pas d'une lésion précise mais de l'étendue de cette lésion. Seuls les singes présentant une lésion des trois secteurs montraient des déficits importants dans ces tâches. Cette étude permet de comprendre pourquoi les résultats de Pohl (1973) n'ont pas toujours pu être répliqués. En effet, d'une étude à l'autre, l'étendue des lésions variait.

Les effets des lésions pariétales ont aussi été recherchés pour des traitements visuo-spatiaux différents de ceux qui sont impliqués dans la tâche d'encodage des relations spatiales. Ainsi, par exemple, Eacott et Gaffan (1991) ont étudié le rôle des lobes pariétaux dans le traitement de l'orientation. En effet, il a été observé que des lésions temporales provoquent des déficits dans l'apprentissage de discrimination visuelle lorsqu'on présente deux formes différentes aux animaux cérébro-lésés, mais pas lorsqu'on leur présente deux formes identiques différant simplement du point de vue de l'orientation (Gross, 1978). La préservation des capacités de discrimination d'orientation lors de lésions temporales inférieures laissait présager un rôle du lobe pariétal dans ces tâches. Afin de vérifier cette hypothèse, Eacott et Gaffan (1991) ont testé les capacités de discrimination des singes après ablation bilatérale des lobes pariétaux inférieurs. Quatre tâches de discrimination étaient proposées aux animaux avant et après opération chirurgicale : une tâche de discrimination des stimuli par la forme et la couleur, une tâche de discrimination par la forme uniquement (stimuli achromatiques), une tâche de discrimination par la taille, et enfin, une tâche de discrimination par l'orientation. Les résultats ont montré que la tâche la plus difficile à réaliser, après lésion, est la tâche de discrimination d'orientation. Les tâches de discrimination des stimuli en fonction de leur taille, de leur forme, ou de leur couleur ne posaient aucun problème aux animaux que ce soit avant ou après lésion. Ces résultats sont importants car ils montrent que la voie dorsale joue un rôle dans la reconnaissance de forme lorsqu'elle n'est possible que par le traitement de l'orientation spatiale.

Une autre étude réalisée par Quintana et Fuster (1993) a montré que les lobes pariétaux ne sont pas seulement impliqués dans le traitement visuo-spatial direct (en présence des stimuli) mais aussi dans la rétention d'informations spatiales. En effet, les auteurs ont montré, en utilisant la méthode du refroidissement, que les singes présentant une inactivation des lobes pariétaux postérieurs éprouvent beaucoup de difficultés à retenir la position d'une cible indiquée préalablement par un indice, et cela en particulier quand le délai entre l'indice et la cible augmentait.

De nombreuses autres études ont été réalisées chez le singe pour délimiter les fonctions des lobes pariétaux dans le traitement visuo-spatial pour la perception, mais aussi pour l'action. Il n'est pas de propos de faire ici une revue exhaustive de toutes ces études. Ce qui est important, c'est que les lésions pariétales provoquent des déficits dans différents types de tâches comme celles requérant le traitement de relations spatiales ou de l'orientation des stimuli, mais aussi les tâches nécessitant de la part du sujet qu'il s'oriente dans l'espace ou encore qu'il effectue des pointages sur des stimuli (pour une brève revue, voir Ungerleider & Mishkin, 1982).

Ainsi, les lésions pariétales peuvent entraîner des déficits visuels, mais aussi moteurs (e.g., Rushworth, Nixon, & Passingham, 1997). Par opposition, les lésions temporales inférieures n'entraînent que des déficits visuels.