2-3-5 Conclusion

Comme nous tenions à présenter l’organisation de nos connaissances spatiales sur la base du concept des Cartes Cognitives, nous avons volontairement insisté sur l’aspect dynamique de la Carte Mentale dans le sens où nos représentations sont en perpétuel changement et transformation au fur et à mesure des déplacements et de l’activité exploratoire (THINUS-BLANC, 1996). Les cartes correspondent finalement à des modules stockant des informations spatiales selon la conception computationnelle. Cette première partie ne se veut pas exhaustive de tous les travaux sur la question de l’organisation. Nous avons tenté d’en faire simplement une présentation synthétique et de faire valoir cette notion de Carte Cognitive qui de notre point de vue a sa raison d’exister de par les caractéristiques très précises des informations spatiales et de l’activité humaine qui lui sont rattachées qu’il s’agisse d’orientation ou de wayfinding.

En résumé, nous retiendrons que les « Cartes Cognitives »se composent de représentations type « route » fondamentalement procédurales constituée d’éléments visuels et sensori-moteurs. Elles s’opposent radicalement à la représentation type « carte », qui respecte la configuration générale ou le schéma de la disposition des objets environnementaux. Malgré la divergence de point de vue, les représentations type « survol » et type « route » manipulent les mêmes objets : les points de repère qui constituent des indices visuels. Ils représentent un premier lien bien que le traitement soit différent. Il faut comprendre dès lors que nous voulons construire un itinéraire, nous utilisons notre « mémoire des routes » qui nous permet grâce à notre capacité d’imagerie de visualiser des repères sous forme de vues frontales. Nous pourrions tenter l’analogie entre la dichotomie « route »/« carte » à celle des connaissances procédurales/déclaratives. La première serait un cas particulier des connaissances car spécifiques du domaine spatial. D’une façon générale, on considère que les connaissances déclaratives sont stables et portent sur des propriétés ou des relations d’objets ; elles représentent le savoir. Elles ont pour caractéristique d’être assez éloignées de l’action concrète, contrairement aux connaissances procédurales. Ces dernières sont liées à l’action ou la mise en œuvre d’une opération comme un savoir-faire. On peut supposer dans une telle conception que le point de repère serait l’unique lien entre les formes de connaissances. Seul varierait le degré d’opérationnalité sur cet élément représenté : ‘ « il peut être utilisé pour les associations stimulus-réponse, pour un niveau intermédiaire reposant sur des relations spatiales topologiques traitées de façon séquentielle, ou encore pour la constitution de cartes ». (THINUS-BLANC, 1992, p.147)

Par ailleurs, les connaissances procédurales peuvent aussi avoir été acquises par l’action sans références approfondie à des connaissances déclaratives (GEORGES, 1988). Cette définition s’applique parfaitement à celle des représentations type route, puisqu’elles correspondent à une séquence rigide de réponses motrice en réponse à une succession de stimuli visuels.

N’oublions pas que MAILLES a relevé la distinction savoir/savoir-faire en l’appliquant au niveau des modèles mentaux. Cette conception est intéressante et complémentaire à l’analogie précédemment évoquée car elle introduit l’idée d’une construction cognitive à visée de compréhension face à un problème posé. Le problème peut être spatial.

Cette première partie met en évidence différents concepts impliqués dans l’organisation et l’utilisation de nos connaissances spatiales qui conduisent à rendre familier l’environnement dans lequel nous circulons. Lorsque l’environnement est parfaitement maîtrisé, les déplacements deviennent alors une sorte de conduite inconsciente, presque automatisée. En définitive, le degré de familiarité de l’environnement conditionne les stratégies d’actions liées au déplacement. La situation devient un problème lorsque les connaissances sur le milieu sont défaillantes ou inexistantes. Ceci fait l’objet de la partie suivante où nous évoquerons les comportements spatiaux lorsque l’environnement n’est pas familier.