3-1-1 Wayfinding et planification

PASSINI (1984) veut démontrer en priorité que la désorientation spatiale peut s’expliquer autrement que par des problèmes liés aux représentations spatiales et aux capacités de cartographie mentale. Il estime que les opérations de prises de décision sont nécessaires au déplacement et rejoint le point de vue de MILLER, GALANTER et PRIBRAM (1960) sur le fait que ‘ « la prise de décision est le lien opérationnel le plus important entre l’image et le comportement » (1984, p.153) ’. L’image dont il est question est ici est l’image mentale qui permet d’accéder aux informations physiques représentées sur l’environnement, soit les Cartes Cognitives . Dans cette conceptualisation, elles sont vues comme des sources d’information utilisées par le processus décisionnel.

Comme l’image entretient une relation de similitude figurale avec les objets qu’elle représente, elle sera alors activée. En d’autres termes, les individus construisent un modèle mental spatial pour atteindre leur but et lorsque la situation le permet, ils vont créer une image mentale figurale des traits physiques de la situation. L’image mentale peut également être sous une forme schématique. C’est à partir de ces données que le plan pourra être construit.

La décomposition d’un itinéraire entre le point de départ et l’arrivée fait apparaître une succession de sous-buts et cette même décomposition se présente comme un plan d’actions avec des prises de décision et l’exécution de ces décisions. Il y a donc deux niveaux : l’élaboration et l’application. Les décisions du wayfinding sont hiérarchiquement structurées dans des plans qui aident non seulement à mémoriser les routes en termes comportementaux, mais aussi à organiser et enregistrer les informations sur l’environnement dans la forme d’une représentation type « route » c'est-à-dire séquentielle.

PASSINI définit donc le wayfinding en terme de résolution de problème spatial qu’il décompose en trois processus inter-reliés :

  • Le développement d’un plan global d’action et prise de décision,
  • L’exécution des décisions et transformation du plan en action et comportement adapté dans un espace spatio-temporel,
  • Le traitement de l’information en rapport avec les décisions.

La combinaison de ces trois performances distinctes garantie la capacité d’atteindre une destination spatiale. Les décisions, niveau cognitif doivent être transformées en action, niveau comportemental.

La tâche complexe de wayfinding selon PASSINI équivaut à une tâche de planification en raison de sa structuration dans un ensemble hiérarchique composé de sous-plans. Ces sous-plans permettent de résoudre le problème spatial, atteindre un but, d’une façon plus flexible en « semi-isolation », tout en sauvegardant la perspective globale du problème. Chaque sous-plan est défini par un petit nombre de décisions successives. Une décision correspond au moins à deux unités : un comportement et un objet physique (ex : tourner à gauche après le feu).

Les sous-plans ne se chevauchent pas, c’est une organisation nécessairement linéaire : c’est-à-dire qu’un sous-plan ne se développe pas tant que le précédant n’est pas pleinement exécuté. Les sous-tâches sont également traitées de façon séquentielle. L’intérêt de la séquentialisation des décisions permet une meilleure mémorisation : les individus sont effectivement capables d’expliquer un itinéraire ardu dans les moindres détails. La structure hiérarchique permet d’enregistrer de longues séquences.

Sur un trajet connu, l’automatisation se substitue à la planification des comportements, car c’est une question uniquement de reconnaissance des objets qui défilent tout au long du cheminement. En revanche, la route est planifiée dès qu’elle est nouvelle. D’après PASSINI (1984), la planification d’une route nécessite deux procédures l’une par l’intermédiaire d’une représentation type « route » et l’autre par une représentation type « survey ». Celle-ci permet de relier le point de départ et d’arrivée sur une vision globale de l’endroit. Par contre, les représentations « route » qui émergent du processus décisionnel peuvent être réactivées, car imprégnées d’expériences passées liées au wayfinding, et sont aménagées différemment de façon à s’adapter à la nouvelle situation. En d’autres termes, avec la réactivation des expériences passées, l’individu peut s’appuyer sur la structure hiérarchique décisionnelle pour organiser les comportements et les informations appropriées de l’environnement dans une représentation séquentielle de type « route ».

Un des intérêts du travail de PASSINI est d’avoir mis en relation l’activité d’orientation et plus particulièrement celle du wayfinding avec la notion de planification et de résolution de problèmes avec l’introduction des connaissances déclaratives ou du contenu des Cartes Cognitives. Ce point de vue est fondamental pour la cognition environnementale.