Contributions expérimentales « LISBOA »

12- Objectifs et définition du protocole de l’expérimentation « Lisboa »

Dans une démarche ergonomique, l’objectif de ce travail est de proposer un outil le plus adapté possible aux besoins des utilisateurs des transports collectifs lors du cheminement piétonnier intermodal. Compte tenu du vide informationnel sur cet aspect dans les réseaux, il semble important de réfléchir sur la manière dont nous pouvons guider les individus à s’orienter et à se repérer dans les espaces multimodaux et intermodaux ! Actuellement, les seuls supports proposés, sous forme de plan de quartier, ne suffisent pas à satisfaire le voyageur en transit. Alors, de nouvelles solutions sont envisagées : des études sur les descriptions d’itinéraires ont pour objectif d’implanter dans des bornes interactives des informations de type verbal qui décrirait le trajet à suivre du point de départ au point d’arrivée en tenant compte évidemment de la partie piétonnière.

L’objectif de ce travail s’inspire des études sur les descriptions d’itinéraire (GRYL, 1995 ; DENIS, 1997) avec toutefois une variante fondamentale sur le contenu de l’information. Nous avons l’intention de vérifier l’intérêt d’une information personnalisée et complète sur tout le déroulement d’un trajet intermodal. Par ailleurs, nous comparerons plusieurs transcriptions référant à l’information spatiale piétonnière afin d’analyser les avantages et les inconvénients de chacune d’elle. L’originalité de ce travail est, en définitive, de comparer des formes courantes d’information avec une forme innovante basée sur des photographies appelée « Photoguide ». En d’autres termes, l’efficacité du « Photoguide » est confrontée à celle du plan et à celle de la description verbale.

Ainsi, les indications de guidage sont traduites par l’un de ces trois modes visuels de communication alors que les informations sur les transports (noms des stations, lignes de bus, noms des arrêts de bus…) sont nommées de façon textuelle.

Parallèlement, dans une démarche de psychologie cognitive, l’objectif est de rendre compte de la validité des images lors d’une activité de wayfinding dans un environnement inconnu. Actuellement, il est encore difficile de connaître la vivacité des images mentales aussi bien sur un plan quantitatif que qualitatif. L’image mentale s’avère relativement impliquée dans la tâche d’orientation spatiale et notamment dans la retranscription, l’évocation d’itinéraire et la confrontation avec l’environnement. Les points de repère sont cités et décrits grâce notamment à nos capacités d’imagerie. Bien que la retranscription soit exprimée concrètement sous forme propositionnelle ou schématique, selon les individus, cette retranscription semble se reposer sur des informations imagées du calepin-visuo-spatial (BADDELEY, 1993 ; LOGIE, COURBOIS 1998). Il est certain que nous ne pourrons activer des images d’un lieu que si nous l’avons perçu directement, préalablement, ou si nous avons un matériel qui nous permet d’en extraire des informations. L’objectif de ce travail est de démontrer qu’une image de type analogique utilisée dans un environnement inconnu peut avoir la même fonction que l’image mentale au cours d’un déplacement familier. L’image représentative ou perceptive permet l’anticipation d’une décision spatiale durant un déplacement 23 .

Par ailleurs, nous envisageons de mettre en évidence le fait que les individus se différencient par rapport à leur inclination à utiliser les différents modes de langage que sont le texte, la photographie et le plan. Selon DENIS (1989) «il est envisageable qu’une même information soit inscrite en mémoire sous des formes alternatives, formes dont l’utilisation serait fonction des contraintes cognitives de la situation de la nature des objectifs à atteindre mais aussi des caractéristiques individuelles». Nous partons du postulat suivant : en matière de résolution spatiale, les individus manipulent soit des représentations imagées soit des représentations propositionnelles. Nous ne savons pas encore ce que contiennent ces images car chez les uns, elles peuvent rester à un état conceptuel, schématique et mathématique et chez les autres elles peuvent se recouvrir d’une pellicule sensiblement analogue à la scène perçue. Nous sommes amenée à penser que la sensibilité pour un mode de langage reflète un mode de représentation.

En acceptant l’hypothèse d’un phénomène de feed back entre une capacité représentative et une pratique perceptive, nous pouvons alors penser que l’intérêt porté vers un mode de langage -qu’il soit constitué d’images, de mots ou de schémas- détermine le mode de langage interne utilisé habituellement en terme spatial.

A partir de là, nous supposons que dans le cas d’un itinéraire non familier, les informations de guidage seraient plus efficaces et plus pertinentes si elles correspondent à la sensibilité de l’intéressé. Car elles généreront une meilleure organisation des connaissances récemment acquises de l’environnement pour mieux l’appréhender.

Notes
23.

Au moment de la préparation de l’expérimentation, nous n’avons pas pu obtenir un test de capacité d’imagerie seulement un test visuo-spatial : le Minnesota Paper Form Board. Dans les tests d’imagerie sont différenciées trois étapes de cette activité, représentées par trois épreuves distinctes : la génération, le maintien et l’inspection des images.(voir GALLINA dans BIDEAUD et COURBOIS, 1998)