Conclusion et perspectives

Au terme de ces études où il était question d’évaluer l’influence de la photographie dans des moyens d’information liés au guidage, des variabilités importantes apparaissent selon les contextes. Tout d’abord, l’aide au déplacement sous forme figurative semble moins bien adaptée pour l’automobiliste que pour le piéton et utilisateur des transports collectifs. Les contraintes temporelles inhérentes à la situation de conduite demandent un système préférentiellement procédural. Le « timing » de l’information prime sur la présentation des repères physiques ; Toutefois, dès que la situation se complexifie telle qu’une intersection avec un rond-point, une représentation graphique globale du carrefour avec en précision des repères saillants aide considérablement le conducteur à prendre une décision.

Pour le piéton, en revanche, nous avons vu que le « Photoguide » est aussi performant sinon plus, en certaines situations, que la description d’itinéraire. L’information est de type route avec la présentation en vue frontale des lieux appréhendés. De cette manière, l’utilisateur se sent rassuré : ce sont des fiches prêtes à l’emploi. Contrairement au plan, les indications sont données dans la bonne orientation pour le lecteur ce qui évite les confusions de direction entre la droite et la gauche. L’efficacité de la photographie par rapport au texte est meilleure lorsque le contexte est plus complexe et, notamment, quand le but n’est pas directement perceptible du lieu où se trouve le lecteur.

En dernier point, nous soulignerons l’influence des performances des moyens d’aide au guidage selon le contexte urbain ou souterrain. Dans le second cas, il semble plus important de suivre les indications de la signalétique plutôt que de guider l’utilisateur selon les différents changement de direction. En revanche, l’information sur les sorties est primordiale car elle participe à l’élaboration de la représentation spatiale des éléments en surface.

Au terme de ce travail, nous souhaitons proposer un certain nombre de perspectives s’inscrivant dans le prolongement de cette recherche.

Conclusion et perspectives de l’usage de la photographie dans les moyens d’informations pour les piétons et utilisateurs des transports collectifs

Notre objectif est de pouvoir offrir aux utilisateurs non familiers des réseaux de transports collectifs (ou qui empruntent de nouveaux itinéraires intermodaux) la possibilité de trouver les arrêts de bus ou les stations de métro le plus facilement et le plus rapidement possible, en leur proposant des descriptions d'itinéraires combinant le texte et l'image grâce au multimédia.

Compte tenu de ces résultats, favorables à l'introduction de la photographie dans les supports d'aide au guidage, il est donc envisageable de créer une base de données mixte : image et texte. Dans un premier temps, cette base pourrait être interrogée à partir d’Internet où les utilisateurs pourraient choisir une information textuelle ou imagée selon leur besoin en terme de guidage. Les sites des réseaux des grandes villes, comme Paris, Lyon et Marseille, pourraient l’intégrer dans un calcul d’itinéraire. Cette information intermodale spatiale sert de lien entre l’espace urbain et le transport. Elle semble plus pragmatique que le plan (sauf pour les habitués de cet outil) dans le sens où elle ne donne pas une information « type carte » mais « type route » c'est-à-dire qu’elle offre directement ce qui est important de voir à la sortie d’un bus ou d’une station de métro pour se diriger vers la destination. L’avantage de la photographie est de donner une vue d’ensemble du carrefour sans qu’il y ait nécessairement un repère saillant. De cette manière, l’intéressé est libre de choisir un repère dans un espace donné.

De notre point de vue, la base sur Internet n’est pertinente que si les réponses aux interrogations peuvent être imprimées car sa finalité est le guidage en situation réelle de déplacement.

Nous voyons deux avantages supplémentaires à l'importation du Photoguide dans le multimédia:

En conclusion de cette étude, il apparaît que la photographie n’a pas seulement une utilité visuelle mais cognitive, d’ailleurs Roland Barthes disait que ‘ « La photographie, c’est comme le mot : c’est une forme qui veut tout de suite dire quelque chose».

Conclusion et perspectives de l’usage de la photographie dans les systèmes de guidage embarqué

En définitive, dans un système de guidage embarqué, une information avec un contenu uniquement procédural est plus performante que l’information contenant la dyade repère-action. En revanche, lorsque la configuration est ambiguë ou complexe, alors le repère, objet spatial et visuel, devient pertinent voire indispensable car il situe l’action : tourner, avant/après, à droite/à gauche de l’objet sélectionné. En effet, certaines situations, que ce soit un sens giratoire, (comme le Carrefour 20 de notre étude, annexe 2) ou une intersection urbaine alambiquée, sollicitent une explication graphique améliorée car une représentation basée sur un fléchage ne suffit pas à être explicite. Nous rejoignons la conclusion de GRYL (1995, p.348) à propos des descriptions d’itinéraires : ‘ « Une description composée uniquement d’indications de changements d’orientation du type « tourner à droite ou à gauche » s’avère insuffisante dans certaines configurations de l’environnement… Une simple indication d’orientation générerait des ambiguïtés trop importantes. »

Nous pouvons supposer que ce repère peut devenir un point d’ancrage en raison de son statut dans l’itinéraire et du contexte spatial, car il est associé à une configuration complexe.

La question est donc de savoir comment représenter les repères physiques dans un système d’aide embarqué ? Les repères urbains sont identifiables et reconnaissables car ils appartiennent à nos connaissances à long terme. Ils sont emmagasinés sous une forme visuo-spatiale et sémantique. En d’autres termes, la reconnaissance de l’objet dans l’environnement est possible soit par le réseau structural soit par le réseau sémantique. Ainsi, le concept « église » peut poser un problème lorsqu’elle affiche une ultra-modernité. Il ne suffit pas de la désigner, il faut aussi la décrire pour permettre la construction de la représentation imagée de ce concept architectural original.

De nombreuses possibilités graphiques existent au niveau Figuratif, de la forme analogique que nous venons de tester, en passant par celle, plus symbolique, composée de pictogrammes (PAUZIE, DAIMON, ET BRUYAS 1997). Cependant, les solutions existantes ne permettent pas encore de réduire les ambiguïtés.

En gardant l’hypothèse d’une représentation graphique analogique, nous pouvons lui apporter quelques modifications. A l’avenir, nous pourrions par exemple tester des photographies de ronds-points, non pas selon une perspective type route, mais légèrement surélevée à 45°. De cette manière, l’automobiliste percevrait la configuration générale du carrefour sous sa forme réelle avec en surimpression le tracé de la trajectoire à suivre. Mais, faut-il améliorer l'information visuelle des systèmes de guidage et de navigation embarqués dans les voitures alors que les études actuelles sur ces derniers s’intéressent préférentiellement au développement des informations vocales et à leur modélisation? L'argument premier est sécuritaire car afin de ne pas détourner le regard de la route, la cible principale en situation de conduite, le canal auditif est alors mis à contribution. Surtout, ces nouvelles technologies permettent de gérer à l’intérieur de l’habitacle la diffusion des informations sonores (téléphone, radio, guidage…) par ordre de priorité et surtout de sécurité (Projet CEMVOCAS, LESCOT).

La diversification de la présentation de l’information pour une population diversifiée.

Dans le cadre de cette recherche, nous avons volontairement insisté sur les caractéristiques de l’image car jusqu’à présent elle n’a jamais été appréhendée comme assistante au guidage en situation réelle. Nous avons testé ses effets dans deux conditions de déplacement, représentées par al voiture et les transports collectifs, différenciées par les contraintes extrinsèques et intrinsèques aux modes de transport. Au terme de la première étude, nous pouvons conclure que les contraintes de la voiture sont telles qu’elles ne permettent pas une très grande liberté de présentation pour des raisons évidentes de sécurité.

Cependant, il nous semble important de réagir face à la modélisation de l’activité cognitive car dans une logique de standardisation de la pensée humaine dont l’objectif est d’offrir à cette même espèce humaine des outils qui lui ressemblent, il ne faudrait pas oublier ce qui fait sa différence. Sans parler des aspects conatifs (le domaine des affects) qui peuvent perturber le raisonnement, nous nous référons à la théorie de l’intelligence multiple de GARDNER H. (1998) 27 . Elle se propose de définir l’intelligence comme ‘ «  un potentiel psychobiologique qui permet de résoudre des problèmes ou de créer des objets appréciés dans au moins un contexte culturel. » ’. Par cette définition, l’auteur ouvre l’éventail des aptitudes. La définition de l’intelligence ne se limite plus aux capacités linguistiques et logico-mathématiques mais comprend l’aptitude musicale, l’aptitude spatiale, l’aptitude du corps à se mouvoir (celle des athlètes). Elle introduit également l’intelligence émotionnelle avec la capacité à déterminer ses humeurs et autres situations mentales et celles des autres individus et les utiliser comme guide du comportement (ex. : S. Freud). De plus, elle est corroborée par des études en neurosciences où l’on reconnaît la nature modulaire du cerveau. Le principe de cette théorie est de faire valoir la diversité humaine dans l’appréhension de l’environnement. Elle se présente d’ailleurs comme un outil qui vise à motiver l’apprentissage des scolaires. Il s’agit d’appliquer la diversité des aptitudes dans l’enseignement.

L’idée principale que nous voulons adopter est celle qui consiste à dire qu’il faut envisager l’apprentissage par différentes manières, en utilisant plusieurs représentations. Si nous considérons un moyen d’information comme une aide à l’apprentissage des lieux, il faut pouvoir offrir à l’utilisateur des supports le choix de la représentation graphique. Nous avons déjà vu que tous les individus ne sont pas capables de manipuler mentalement des plans ou des cartes routières. Ces outils font appel à l’intelligence spatiale qui est relativement variable entre les individus. Nous pensons que la description d’itinéraire verbale, seule ou complétée d’une photographie, peut satisfaire la famille des « béotiens des cartes ».

Notes
27.

GARDNER H., (1998), Les formes d’intelligence, Pour La Science, n°254, 136-142