I.2.1.2 Objectivité et subjectivité

La réflexion précédente pointe un problème plus général auquel se confronte l'espérance un peu naïve dans une description issue de l'expérience seule. Comme nous l'avons déjà dit, ce que je perçois dépend aussi de paramètres qui me sont propres. On distinguera parmi ces paramètres ceux qui me sont propres par rapport à quiconque dans la même situation spatiale (même situation de perception, on parlera alors de subjectivité "forte" pour évoquer ces variations interindividuelles) de ceux qui me sont propres par rapport à quiconque observant les même phénomènes avec un autre point de vue spatial (on parlera alors de subjectivité "faible" ou de subjectivité contextuelle). Le point de vue objectif, quant à lui viserait à étudier l'indépendance existentielle de l'événement sonore (Casati & Dokic, 1994) et ses caractéristiques. La physique vise également ce type de description mais se donne pour ceci des moyens expérimentaux dont l'observation et l'analyse sont inévitablement quelque peu subjectives. Le problème est légèrement différent pour la physique scolaire. Nous verrons que la nécessaire corrélation avec l'écoute auditive imposée par le savoir scolaire rend difficile l'élaboration d'un point de vue "objectif". Comme le disent Casati et Dokic (1994), ‘"un objet sensible ne peut pas être complètement dépendant, spécifiquement parlant, du sujet percevant ; sinon, on voit mal comment l'objet pourrait relever d'une espèce capable d'exister indépendamment de tout sujet percevant"’ (p. 179).

Il ne faudra donc pas s'étonner de trouver dans la suite de ce travail une association parfois schématique entre la facette "physique" du son (le son comme l'ensemble des événements hors de la sphère auditive) et une certaine objectivité (ou indépendance existentielle). De même la subjectivité sera évoquée plutôt en relation avec la facette perceptive du son.

Les possibilités de description des sons perçus existent ‘"parce que l'indépendance existentielle est compatible avec une certaine dépendance spécifique entre l'objet sensible et le sujet percevant"’ (Casati & Dokic, 1994, p. 179).

C'est cette compatibilité qui est mise en débat dans ce qui va suivre. Dans un processus d'apprentissage, la physique ne peut en effet pas s'affranchir de cette relation entre sujet percevant et objet sensible. Mais avant d'aborder l'étude de ces relations entre un point de vue "objectif" et un point de vue plus "subjectif", il est important de rappeler dans quelle mesure ils s'influencent mutuellement.