III.1.1.1 Cadre général d'analyse : revue des systèmes explicatifs

Nous considérons dans un premier temps que lorsqu'un individu est amené à donner une explication, une interprétation ou une prédiction au sujet d'un événement du monde sensible, il met en relation des concepts avec ses perceptions. Il est donc capable d'utiliser ces concepts et de leur attribuer certaines propriétés. En d'autres termes, il établit des liens entre les objets et les événements d'une part et ses propres systèmes explicatifs d'autre part, les seconds étant utilisés en référence aux premiers. Ces systèmes explicatifs font appel à des concepts plus ou moins complexes mais également à des liens entre ces concepts ou encore à des relations causales. Ils peuvent être vus comme des théories naïves (Carey, 1985) ou plus généralement comme toute structure conceptuelle que les travaux de recherche ont pu mettre en évidence grâce à la production, par les individus, d'invariants dans la description et/ou l'explication qu'ils font des objets et des événements. La question se pose alors de savoir à quel point ces systèmes explicatifs dépendent de la situation proposée et finalement quel degré de généralité ils possèdent : ce sera l'objet spécifique de l'expérimentation que nous proposerons dans les chapitres VII et VIII.

Nous considérons dans un premier temps, pour analyser les processus d'enseignement et d'apprentissage, que les éléments d'ordre conceptuels et ceux d'ordre perceptifs sont imbriqués (Gooding, 1992). Nous adoptons ce cadre général pour caractériser d'une part les savoirs du physicien d'autre part les savoirs quotidiens. Si cette imbrication ne pose généralement pas de problème au physicien, elle peut en revanche être un obstacle à l'apprentissage de la physique par l'élève. Dans une optique d'enseignement et d'apprentissage, il faudra pouvoir désimbriquer ces éléments pour pouvoir proposer à l'élève des éléments d'ordre théorique qu'il mettra en relation avec les objets et les événements. Les relations entre ces deux facettes perceptives et conceptuelles seront approfondies dans la partie B lorsque nous analyserons l'activité de modélisation. En effet, établir un lien entre d'une part ce qui est perçu dans le monde des objets et des événements et d'autre part ce qui est d'ordre plus théorique, plus abstrait, ce qui peut en fait recouvrir une structure de modèle, consiste à modéliser. Nous nous bornons pour notre part à une description relativement statique des savoirs en jeu, sans nous intéresser dans ce paragraphe aux modifications dynamiques des structures de savoirs qui résulteraient d'un apprentissage.