III.1.1.2 Caractérisation des concepts

Les concepts interviennent donc dès qu'il y a interprétation, explication et même parfois description de ce qui est perçu. Nous donnons ici quelques pistes théoriques qui éclairent ce que nous entendrons par concept.

Weil-Barais (1993) distingue une conception empiriste des concepts et une conception rationaliste. La première estime qu'il y a concept dès qu'il y a repérage d'attributs invariants, ainsi former ces concepts revient à extraire/identifier ces invariants. Les concepts sont alors définis par une collection d'objets représentatifs ou par la liste des attributs qui le caractérisent. On pourra ainsi dans cette perspective parler du concept de table en y associant par exemple les attributs plan horizontal et au-dessus du sol. Ce point de vue, proche de celui de la psychologie, s'oppose au point de vue rationaliste qui voit le concept comme une entité mentale élaborée en vue de pouvoir expliquer et interagir. Ce point de vue est utile dès qu'on cesse de s'intéresser à des concepts catégoriels, définis par leurs invariants, et qu'on prend en compte les concepts relationnels qu'on rencontre en science. Ces concepts ne prennent sens que dans leur relation à d'autres grandeurs physiques. La référence aux objets devient dans ces conditions bien plus complexe et l'approche empiriste ne suffit plus pour définir et caractériser les concepts. Weil-Barais donne comme exemple de concept relationnel l'énergie, concept utile pour la description et l'interprétation de phénomènes très différents, en relation avec des grandeurs physiques très diverses. Cette opposition entre empirique et rationnel se retrouve plus ou moins fidèlement dans d'autres types de caractérisations des modèles. L'épistémologue Cassirer (1910) distinguait déjà dans le même ordre d'idée les concepts catégoriels et les concepts relationnels. Reif et Allen, cités par Tiberghien (1999), distinguent en physique les concepts "les plus simples" et les concepts aux propriétés plus complexes. Les premiers réfèrent à une entité particulière (particule, triangle, objet visible), les deuxièmes s'apparentent plutôt aux concepts relationnels puisqu'il est possible de les associer à des grandeurs mesurables. On peut lire aussi la distinction entre concepts catégoriels et relationnels dans la séparation que fait Vygotski (1934) entre concepts quotidiens, qui se rapprocheraient du point de vue empirique ou catégoriel, et concepts scientifiques, plus proches du point de vue rationaliste ou relationnel. Pour tenter de donner une définition qui conviendrait pour les différents points de vue, il nous paraît intéressant d'utiliser le point de vue de Vergnaud (1991) qui définit lui le concept comme un triplet de trois ensembles :

Entre le point de vue de la psychologie qui a adopter une acception assez large des concepts (des entités très variées peuvent être concepts) et la didactique de la physique qui tend à considérer qu'un concept est forcément un concept de la physique, nous tentons ici de trouver une voie intermédiaire. Puisque nous considérons que toute explication, même quotidienne, implique le recours à des concepts, nous proposons de caractériser les concepts de la physique d'une part, les concepts spontanés ou quotidiens d'autre part.