VII.5 Élaboration et utilisation des grilles d'analyse

VII.5.1 Élaboration

Pour pouvoir effectuer un traitement quantitatif et statistique des réponses ouvertes, il est indispensable d'utiliser des grilles d'analyse et de codage. Chaque production en langage naturel ou éventuellement schématique est ainsi codée à l'aide d'une grille spécifique à chaque question. Nous détaillons ici le processus d'élaboration de ces grilles et les éléments pris en compte.

Notre ligne directrice a ainsi été celle d'un équilibre entre la possibilité de regroupement des catégories de codage pour dégager de grandes tendances dans les réponses et la dégradation minimale de l'information contenue dans les réponses.

Garder le maximum d'information impose d'établir une grille précise (ce qui en facilite d'ailleurs la transmissibilité), à petit grain d'analyse. Cependant, notre approche impose de dégager des grandes tendances de conceptualisations, qui dépassent si possible le niveau de la situation unique. Il convenait alors de regrouper ces catégories a priori lors de l'établissement de la grille, et a posteriori lors de l'analyse des résultats.

Nous avons donc dû élaborer une grille par question (les grilles sont fournies en annexe). Ceci a été le seul moyen de préserver le maximum des informations contenues dans les productions des élèves, souvent très contextuelles. Coder une réponse, c'est inévitablement juger cette réponse et perdre de façon quasi inévitable une partie de l'information (sauf si la réponse correspond exactement à telle ou telle catégorie). Nous devions alors élaborer des grilles qui dépassaient le jugement subjectif (le "jugement" doit être sans équivoque et déboucher sur une catégorie unique quel que soit le codeur) en perdant cependant le minimum d'information.

Nous avons pu illustrer dans les paragraphes précédents l'importance que nous attribuons aux cadres conceptuels. Ils sont la trame principale commune aux grilles. Les codes d'analyse sont ainsi toutes regroupées par cadre conceptuel ou par combinaisons de cadres conceptuels. Ceci est illustré par le texte ci-dessous qui donne les codes d'analyse des réponses à la question N ‘("Donnez une condition pour faire un son").’

  1. Pas d'informations
    1. pas de réponse

    2. "je ne sais pas"

    3. paraphrase

    4. réponse inexploitable

  2. Perception (cadre conceptuel 1)
    1. il faut entendre quelque chose, il faut une personne pour entendre, un tympan...

    2. paraphrase du type "il faut qu'il y ait du bruit"

  3. condition "milieu matériel", évoquant le trajet du son (cadre conceptuel 2)
    1. nécessité d'un milieu
      1. avoir de l'air

      2. avoir un gaz

      3. un milieu matériel, un milieu de propagation, autre chose que du vide

    2. vibration(s) du (dans) milieu (ou mouvement, déplacement du milieu)

    3. ondes (hors source)

    4. il faut qu'il y ait propagation (en tant que phénomène nécessaire) dans air ou milieu

    5. point de vue micro
      1. il faut des particules ou des molécules

      2. il faut des particules (ou mol.) en vibration ou en mouvement

  4. condition sur "source" (cadre conceptuel 3)
    1. deux objets (ou un seul)
      1. en interaction de contact

      2. en interaction à distance

      3. en mouvement

      4. sans préciser

    2. un émetteur
      1. une voix

      2. précis (type haut-parleur, instrument)

      3. en général (ou source) ou « émetteur » sans préciser

    3. un mouvement

    4. une vibration (privilégiée p/r à mouvement si les deux sont cités)

    5. des vibrations

    6. caisse de résonance ou mécanisme amplificateur

    7. fournir de l'énergie

  5. condition combinée
    1. vibration(s) + milieu de propagation

    2. un émetteur + un récepteur

    3. un émetteur + un milieu de propagation

    4. un milieu de propagation + un récepteur

    5. un émetteur + un milieu de propagation + et un récepteur

  6. autre
    1. Il n'y a pas de condition

    2. il faut un bruit

    3. autre

Nous avons donc, avec de telles grilles, la possibilité de coder bien plus que les cadres conceptuels qui émergent des réponses. Ce seul codage aurait rendu l'analyse unidimensionnelle et dégraderait énormément l'information. Nous avons par contre la possibilité de voir assez rapidement, une fois les réponses codées, si un cadre conceptuel prédomine (tous les codes commenceraient par exemple par 3 dans l'exemple ci-dessus).

Ce regroupement a priori par cadre conceptuel n'empêche en rien les analyses sur un autre plan, en opérant des regroupements a posteriori entre différents codes. Ceci est permis par la finesse d'analyse que nous avons choisie. En prenant toujours la même question pour illustrer notre propos, nous pouvons ici regrouper tous les codes qui évoquent la notion de vibration (en l'occurrence 2.2, 2.5.2, 3.4, 3.5, et 4.1). Pour permettre ces regroupements, il convenait de disposer d'un nombre suffisant de catégories, résultat de l'équilibre entre finesse d'analyse et temps nécessaire pour coder (le temps de codage augmente avec le nombre de catégories).

Les grilles ont été finalisées par de nombreux tests. Une petite centaine de questionnaires a permis de mettre au point ces grilles en vérifiant deux points essentiels :

  • la grille élaborée est capable de coder la quasi-totalité des réponses (la catégorie "autre" devant rester très marginale) ;

  • la catégorie doit pouvoir être choisie sans vraiment d'hésitation, en prenant soin de choisir celle qui dégrade le moins l'information.

Un échantillon de l'ordre de la centaine a semblé suffisant pour permettre une élaboration définitive des grilles.