VIII.1.8.3 Résultats essentiels

• Un fort taux d'absence d'information
  Il était intéressant, pour les raisons invoquées ci-dessus, d'observer le taux d'absence d'information. On obtient alors le taux le plus élevé de toutes les questions étudiées. De plus, et ceci est également très remarquable, ce taux ne diminue pas après enseignement : 36% avant, 38% après. Notons qu'il y a plus de deux fois plus de réponses "je ne sais pas" que de non-réponses. Ceci confirme ce que nous avions envisagé, à savoir l'observation d'élèves démunis face à une situation qui n'est pas reconnue comme une situation voisine d'une situation traitée en cours. Les élèves ne parviennent donc pas à franchir les obstacles que nous avons mentionnés à ce sujet.
  Il est intéressant à ce stade de signaler que seulement la moitié (51%) des 90 élèves ne donnant pas d'informations avant enseignement restent dans cette catégorie après enseignement. Ainsi, sur les 257 élèves qui ont passé le questionnaire (au moins une fois avant ou après), 139 auront au moins une fois été dans l'incapacité de donner une information sur la situation, soit plus de la moitié du total des élèves (54%).
  Il était de plus intéressant d'observer les réponses qui ne consistent qu'en une reformulation de la situation. Nous considérons qu'il y a reformulation lorsque soit le rapprochement seul de l'ambulance est invoqué soit il y a mise en relation, comme dans l'énoncé, entre le rapprochement et l'évolution du son. Nous avons donc regrouper sous l'étiquette "reformulation" les réponses des types suivants :

  1. parce que l'ambulance se rapproche, parce que la distance change

  2. rapprochement ou changement de distance donc c'est plus fort

  3. rapprochement ou changement de distance donc changement d'une propriété liée au niveau sonore (amplitude ou fréquence)

  4. rapprochement ou changement de distance donc c'est plus aigu (nous considérons cette réponse comme une reformulation dans la mesure où ces deux faits sont déjà corrélés dans l'énoncé)

  5. parce qu'on entend comme ça, c'est comme ça...

Nous obtenons alors 21% de réponses avant et 13% après enseignement (diagramme VIII.1-28).
Notons que, aussi bien avant qu'après, les réponses de type a) constituent plus de la moitié des reformulations. On voit donc que la majorité de ces reformulations se contentent d'invoquer le rapprochement de l'ambulance, ce qui peut donc aisément être considéré comme de la paraphrase (partielle) de l'énoncé.

diagramme VIII.1-28 : question L, absence d'information et reformulations

Finalement en laissant de côté les absences d'informations et les reformulations, nous constatons que cette question ne "concerne" que moins de la moitié des élèves (43% avant, 49% après). Une reformulation ne signifie pas une absence de réflexion de la part de l'élève mais une impossibilité à se dégager de la situation et de la corrélation déjà signalée dans l'énoncé entre rapprochement de l'ambulance et son plus fort et/ou plus aigu.

• Une variété importante d'explication et cadre explicatif
  Les explications fournies sont très variées même si la grande majorité des réponses se font dans le cadre conceptuel 2 "trajet, son hors source". En effet, très peu d'élèves (2 élèves avant, 3 après) répondent en terme de source sonore (réponses du type c'est du fait de l'ambulance ou lié au fait que l'ambulance bouge).
  Au sein du cadre conceptuel 2, les réponses sont relativement différentes les unes des autres si bien que, compte tenu du faible nombre de réponses effectives (hors absence d'information et reformulation), il est assez difficile de dégager de grandes tendances. Avant de tenter cependant de préciser celles-ci, signalons quelques exemples de réponses qui n'ont pas prétention à être représentatifs mais qui donnent un bon aperçu de la diversité des réponses, des niveaux de connaissances variés auxquels elles font appel, et de la difficulté à coder certaines de ces réponses :

  • P01121 "car l'espace entre moi et l'ambulance diminue, donc les vibrations sont plus rapprochées donc la fréquence est plus élevée"

  • P10216 "car la distance T entre l'ambulance et la personne est moins grande. Or la fréquence = 1/T donc f sera plus grande et le son plus aigu vu que la hauteur d'un son dépend de sa fréquence."

  • P07308 "car les vibrations de la sirène sont plus rapides"

  • P07307 "le son est plus aigu car avec la vitesse le son ne peut pas rebondir sur un objet." Codé autre

  • P07331 "car le son aigu diminue en s'éloignant" codé 24

  • L13118 "parce que la vitesse accentue le son" codé 4

  • L02312 "les sons "aigus" sont plus "courts" que les sons graves, un son aigu est plus vite "camouflé" par les parasites contrairement à un son grave"

  • L10221 "c'est pour que les personnes dehors et ceux dans leur véhicule qui sont à plusieurs mètres sachent qu'ils doivent libérer le passage." codé 42

  • L07110 "les sons aigus ont une plus petite amplitude que les sons graves" codé 42

  • L07307 "car le son se déplace moins vite que la voiture" codé 42

  • L07331 "il est plus aigu car le son se mélange avec la vitesse donc vu qu'il était grave loin, il est aigu de prêt." codé 23

• Un son aigu par nature, qu'on entend de mieux en mieux
  Avant enseignement, 29 élèves (12%) exposent plus ou moins explicitement l'idée selon laquelle entendre de mieux en mieux (du fait du rapprochement) un son aigu (au sens où c'est une de ces caractéristiques d'être aigu) rend le son plus aigu à notre oreille. L'idée est ici reformulée clairement par nos soins et le lexique des réponses n'est pas toujours celui-ci. Ainsi certains évoquent une meilleure perception du "vrai son", ou du son aigu de l'ambulance. Ceci est remarquable dans la mesure où le fait qu'on ait une sirène d'ambulance, étiquetée "son aigu", est, accompagné d'un rapprochement, déterminant. Tout ce passe comme si en percevant mieux le son on percevait mieux son caractère aigu. Ils ne sont plus que 15 à exprimer la même idée après enseignement (6 d'entre eux avaient déjà répondu ceci avant).
  Nous pouvons bien sûr considérer que ces réponses ont à voir avec le cadre conceptuel 1 ("perception"), puisqu'elles donnent une importance capitale à une propriété de la perception humaine et qui s'écarte fortement de ce que la physique entend par aigu.

• Peu de corrélations explicites "plus fort donc plus aigu"
  Seulement 14 élèves avant enseignement et 8 élèves après enseignement font le lien causal explicite entre plus fort et plus aigu. On peut voir dans cette légère baisse l'effet de l'enseignement qui sépare caractère fort/faible et caractère aigu/grave. Ces réponses auraient peut-être été plus nombreuses si le son en question (et son évolution) avait effectivement été perçu.
  On a déjà dit, en parlant des reformulations qu'un nombre similaire d'élèves se contentent d'expliquer pourquoi le son est plus fort (par le rapprochement de l'ambulance).

• Une progression de l'invocation de l'augmentation de la fréquence mais un taux qui reste faible
  Un élément fondamental du savoir à enseigner est la relation entre la perception de plus en plus aiguë et l'augmentation de la fréquence de vibration. Cependant, il n'y a pas de raison (en tous les cas le savoir à enseigner n'en donne pas) de penser a priori que, dans la situation proposée, la fréquence de vibration de la source varie (ce qui n'est effectivement pas le cas). C'est la fréquence de vibration de l'air au niveau de l'oreille qui augmente, si tant est que cette connaissance soit posséder et exploitable par les élèves. Il est donc intéressant de regarder si cette connaissance peut être réinvestie ici, en jouant sur l'ambiguïté au sujet de "l'objet" qui vibre : l'élève peut se contenter alors d'invoquer l'augmentation de la fréquence de vibration, sans dire ce qui vibre. Ceci a en plus pour effet de rendre le propos plus scientifique.
  Ce type de réponse progresse effectivement au cours de l'apprentissage mais parti de très bas (2 élèves dont un redoublant), il n'atteint pas un nombre très important (19 occurrences soit 8%). Ainsi, soit l'attention est focalisée sur la source (l'élève pense que seule la fréquence de vibration de la source est en jeu et que ça ne peut pas s'appliquer ici) soit le contexte et la formulation de la question rendent difficile un appel à des concepts de la physique.
  Notons enfin que nous n'avons évoqué ici que des réponses invoquant une augmentation seule de la fréquence et qu'elles ne couvrent pas toutes les réponses dans lesquelles la fréquence est mentionnée (voir l'analyse lexicale pour un dénombrement des emplois de fréquence). En particulier 3 élèves précisent après enseignement que le son est plus aigu parce que la fréquence de vibration est plus petite.

Pour finir remarquons que quasiment personne ne tente d'interpréter la situation à l'aide d'un point de vue microscopique ou de l'évocation de compressions (aucun avant, 2 après), ce qui tend à confirmer l'hypothèse formulée au début de la présentation de cette question sur la difficulté du recours à une interprétation microscopique.

Remarquons également que quasiment personne ne nie le fait que le son devienne plus aigu (1 avant, 3 après) ni n'invoque une illusion auditive (2 avant, 4 après).