Au sujet de l'ingénierie

Les enseignements que nous pouvons tirer de l'évolution des élèves ayant suivi les séquences du groupe SOC sont plutôt positifs.

Il n'en reste pas moins que nous n'avons pas la possibilité de savoir précisément ce qui est déterminant, parmi les différences entre un enseignement "classique" et celui du groupe SOC, pour les évolutions constatées. L'établissement des relations entre telle acquisition et telle activité nécessite une méthodologie spécifique basée en particulier sur une observation fine de l'activité des élèves tout au long de l'enseignement. La littérature montre par contre l'extrême difficulté d'une comparaison des liens entre causes et effets pour deux enseignements différents. Ceci restait de toute façon illusoire ici puisque nous n'avons suivi l'activité des élèves ni lors d'un enseignement "classique" (dont les textes officiels ne sont qu'une très grossière approximation) ni lors de l'enseignement expérimental du groupe SOC (ce qui, dans ce cas, a par contre été fait par d'autres recherches).

Enfin nous pourrions également nous interroger sur les effets à plus longs termes des enseignements proposés. La proposition n'est pas originale mais reste sans réponse du fait des difficultés méthodologiques auxquelles elle se heurte (suivi des élèves). Il n'en reste pas moins que sur un sujet si "familier", il est à craindre que les connaissances de physique, au mieux coexistent avec les connaissances quotidiennes, au pire disparaissent après quelques années supplémentaires d'expériences quotidiennes des sons.

L'ingénierie présentée n'a pas directement bénéficié des résultats présentés dans cette thèse, pour des raisons chronologiques. Si nous avions eu un tel projet, la question se serait effectivement posée de l'articulation entre des résultats de recherche de cet ordre, parfois éloignées du savoir à enseigner mais pourtant indispensables à la réflexion, et l'élaboration de séquences d'enseignement. Notre travail est une contribution à l'ensemble des recherches qui visent à passer de façon constructive et systématique des résultats sur les systèmes explicatifs à des propositions de contenus et de séquences d'enseignement qui en tiennent compte.

De la même façon, la didactique devrait pouvoir poursuivre ses réflexions sur l'articulation entre de tels résultats sur les systèmes explicatifs et la conception d'outils de simulation pour favoriser, entre autres, la modélisation. La démarche adoptée pour la conception de simulaSON contribue à ces réflexions qui restent ouvertes.

Il nous paraît à ce sujet indispensable que les chercheurs en didactique prennent eux-mêmes en charge la conception de ce type d'outils basés sur des résultats ou des hypothèses de recherche (sans oublier cependant les contraintes d'ingénierie si c'est la destinée du logiciel). La validation ultérieure n'en sera que plus fructueuse. Nous pouvons regretter que cette validation n'ait pas été effectuée dans notre cas. Une analyse fine de l'activité d'élèves débutants résolvant les tâches proposées serait à mener. Les conditions de l'expérience sont toutes réunies pour que celle-ci soit réalisée rapidement. Il serait également intéressant d'estimer l'effet d'un apprentissage à l'aide de simulaSON sur l'évolution des productions des élèves en réponses aux questionnaires proposés.

Les deux outils d'ingénierie présentés ont mis en évidence la distinction des entités impliquées dans un processus de modélisation. L'explicitation de cette distinction nous semble devoir être renforcée dans l'enseignement, surtout sur des sujets comme le son. Permettre à l'élève ces réflexions metacognitives doit faire l'objet de beaucoup de soin mais devrait pouvoir contribuer à l'acquisition d'idées plus justes sur la nature de la physique, ses objectifs, ses méthodes et le rôle des modèles qu'elles proposent. De quoi, peut-être, redorer le blason d'une discipline de plus en plus délaissée par les élèves. Nous voulons croire en effet que les raisons de ce désintérêt résident dans la méconnaissance de la discipline, bien plus que dans la pensée souvent vérifiée selon laquelle la physique n'enrichit que... l'esprit.