Mais qu’est-ce que le paradoxe sinon la manifestation la plus violente, ou la plus voyante, d’un système de relations autonome structurant le monde poétique ? De fait, l’univers de Supervielle présente un tissu relationnel quelquefois lâche ou lacunaire, le plus souvent extrêmement dense et subtil. Parfois donc, la cause ne produit pas pleinement l’effet escompté et il pèse sur le procès une restriction qui en réduit singulièrement la portée :
À l’inverse, le code textuel propose fréquemment un réseau relationnel très serré. La phrase se plaît alors à relier les différentes actions qu’elle présente :
Des faits par nature profondément différents se trouvent inscrits dans la même chaîne événementielle. Comme à la recherche d’un sens que lui déroberait une plate énumération, la grammaire textuelle semble souvent préférer la relation de cause à effet à la simple juxtaposition ; ainsi le texte recourt-il fréquemment aux connecteurs marquant la cause ou la conséquence :
Un événement est rarement isolé. Il s’inscrit volontiers dans une suite de transformations, comme si sa justification se trouvait forcément dans les réseaux d’une causalité foisonnante.
Voilà donc un système qui parfois restreint ou sépare, le plus souvent relie, dans les deux cas selon des lois qui lui sont propres. Jeux de conjonction ou de disjonction, les paradoxes répondent aux mêmes nécessités internes. Ils procèdent du même code textuel, seulement ils en exploitent plus avant l’originalité.
« Portes », Les Amis inconnus, p. 330.
« Le Pommier », Les Amis inconnus, p. 302.
« Le Faon », Le Forçat innocent, p. 286.
« À Ricardo Güiraldes », Les Amis inconnus, p. 313.
« La Revenante », Gravitations, p. 202.
« Le ciel se penche sur la Terre et ne la reconnaît plus... », Le Forçat innocent, p. 278.
« L’Antilope », Les Amis inconnus, p. 334.