Si de telles différences se déclarent entre vers pairs et impairs dans le traitement du paradoxe, on peut penser que le verset imposera lui aussi sa marque sur les séquences qu’il renferme. De fait, il induit en général une structure syntaxique à la fois moins dense et plus complexe, au total moins fermement dessinée que le vers régulier. Plus long, plus diffus, tel sera donc le paradoxe inclus dans le verset. Cela se vérifie tout particulièrement dans le discours, puisqu’alors l’irrégularité du rythme tire le texte vers le type conversationnel, où la densité n’est pas de mise :
Ainsi le verset permet-il de filer longuement les paradoxes, en particulier lorsque, combinés à des marques d’oralité (cf. ci-dessous la formule introductrice et le caractère redondant du deuxième verset), ils relèvent de la technique du conteur-poète. Celle-ci implique en effet une évocation détaillée de toute situation extraordinaire :
Toujours dans le discours, il arrive que le paradoxe entre dans un processus d’auto-engendrement ou pour mieux dire, de démultiplication : maillon d’une argumentation elle-même paradoxale, il appelle des incidentes ou des séquences complémentaires. Le verset apparaît alors comme le cadre d’élection du paradoxe argumentatif :
« À Ricardo Güiraldes », Les Amis inconnus, p. 313.
« Prière à l’inconnu », La Fable du monde, p. 363.
« Le Chant du malade », L’Escalier, p. 574.
« Prière à l’inconnu », La Fable du monde, p. 363-364.