Outre ces différents procédés, l’humour contribue à sa manière à la résolution des discours contradictoires. Nul mystère, par exemple, dans la formule « ‘racines volantes’ »1625. Si paradoxale qu’elle paraisse, elle n’offre à l’esprit aucun obstacle à franchir, aucune contradiction apparente à dépasser : le sens est déjà là, puisque l’énonciateur est un arbre qui, à l’instar des humains (cf. par ex. le pied de l’arbre), décrit la réalité environnante selon sa propre morphologie. Le texte sous-entend par conséquent une inversion des rôles qui prête à sourire. Autre structure paradoxale purement ludique : dans Le Forçat innocent, un poème s’amuse à évoquer le parfum des fleurs de tapisserie :
La séquence se donne dans un sourire sans exiger le moindre travail d’interprétation : elle est transparente.
Un énoncé peut aussi revêtir une forme paradoxale pour répondre à la logique du jeu de mots :
La structure du paradoxe permet alors de concilier les jeux de langage et les contraintes sémantiques :
Ici, en effet, verticale tombe résulte à la fois de l’homophonie amenée par la rime-calembour (tombe) et de la nécessité d’accorder le syntagme appositif avec le contexte (d’où l’adjectif verticale). On voit ce que permet le jeu de mots quand il ne menace pas la logique discursive du poème : grâce à lui, le texte satisfait aux exigences contradictoires de la partie et du tout.
« Premiers jours du monde », La Fable du monde, p. 360.
« Les Fleurs du papier de ta chambre », p. 289.
« Madame », Oublieuse mémoire, p. 491.
« Céleste apocalypse », 1939-1945, p. 418.