3. Le rôle du paradoxe dans la mise en scène d’une comédie narcissique

La pratique ludique peut aussi confiner au jeu dramatique et se donner un enjeu plus sérieux. Ainsi, dans un poème de « Nocturne en plein jour », le silence :

[...] préfère s’attarder
Aux lèvres d’un clairon de pierre
Où il feint de se déchirer
Pour son ivresse solitaire1663.

Ici le jeu est en effet plus complexe, puisqu’il se nourrit d’une représentation et que la gratification passe par une feinte. Plus précisément, le silence se tourne vers la représentation muette et inoffensive de ce qui pourrait le détruire et l’on entre par là dans un univers de simulacres où la douleur est mimée, jouée en vue d’un bénéfice narcissique.

Face aux leçons de l’expérience et aux formules figées qui les cristallisent, aux prétendues évidences et aux scénarios intangibles, le paradoxe dispose donc de plusieurs stratégies : le renversement, la subversion, la fantaisie et l’humour, qui peuvent à l’occasion se teinter de préciosité ou suggérer des liens obscurs entre la crainte et le désir.

Notes
1663.

« Le silence cherche un abri... », La Fable du monde, p. 384.