2. Le paradoxe et la cohérence textuelle

En outre, et contre toute attente, le paradoxe superviellien contribue à la cohérence textuelle. En effet, nous l’avons vu à maintes reprises se greffer sur une comparaison ou une métaphore afin de réduire l’écart entre le comparant et le comparé et préserver ainsi la cohérence, l’équilibre du poème :

Comme chaque nuit elle s’étoila
De ses milliers d’yeux dont aucun ne voit 1677
Car l’ennemi est dans la place
Blanc comme écume d’océan,
mais écume qui s’éternise 1678
[...] des yeux sans fond [...] se gorgent
des vins sans vigne des lointains1679.

En somme, le paradoxe peut s’inscrire dans deux logiques antagonistes. En effet, sa situation dans la poétique de Supervielle — là, précisément, où le refus de la doxa s’exprime haut et clair sans chercher pour autant à parasiter le discours du poème — l’amène tour à tour à étayer par l’argumentation la logique d’une séquence précédente et à servir celle du texte en préservant sa cohérence sémantique.

Notes
1677.

« Visite de la nuit », Les Amis inconnus, p. 346.

1678.

« L’Homme », Oublieuse mémoire, p. 495.

1679.

« Homo sapiens », 1939-1945, p. 466.