3 . La dialectique figuratif / opératif

Le figuratif concerne les états et l’opératif les transformations. Mais, comme tout état résulte d’une transformation et inversement, il est impossible de séparer ces deux aspects opposés de la connaissance.

Le figuratif représente le support quasi invariant grâce auquel peuvent s’effectuer les transformations. « ‘Ce support dans sa particularité et sa généralité sert de tremplin pour penser la généralité. Ainsi, les schèmes sensori-moteurs deviennent-ils, par construction et reconstruction, les schèmes opératoires de la période des opérations concrètes’. »95

Les aspects figuratifs et les aspects opératifs de la connaissance sont toujours présents et s’impliquent réciproquement. Ils constituent une dialectique avec des rapports de dominance qui s’inversent suivant les modalités de l’activité. Ainsi, tantôt le figuratif domine l’opératif, tantôt l’opératif domine le figuratif. Malgré la dominance d’une modalité, il ne faut pas perdre de vue l’existence de l’autre modalité sous-jacente. Génétiquement, on constate que la dominance du figuratif précède celle de l’opératif. Synchroniquement, ces deux procédés peuvent prévaloir successivement les uns sur les autres selon des rythmes et des durées variables.

On peut utiliser le modèle suivant proposé par J-M Dolle pour symboliser l’alternance du figuratif et de l’opératif ainsi que la dominance de l’un sur l’autre qui s’inverse. J-M Dolle dénonce lui-même le caractère schématique mais aussi formel de cette représentation : « ‘Elle ne respecte ni la genèse dans son aspect construction-reconstruction par paliers intégratifs successifs, ni la différence de niveau de construction atteint’ ».96

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Figure 3 : La dialectique figuratif / opératif

Cette modélisation tient compte à la fois de la synchronie (à un instant t, le fonctionnement se caractérisera toujours simultanément par des aspects figuratifs et des aspects opératifs) et de la diachronie (qui comporte cinq phases d’évolution).

La dominance figurative se traduit par une activité du sujet réglée sur l’objet (c’est l’objet qui impose ses limites à l’activité). Le sujet ne perçoit que l’aspect statique et configural de l’objet. Sa connaissance se résume à une contemplation.

Après avoir relié notre questionnement pratique au thème de l'identité de l'objet, nous allons voir comment ce thème est abordé par J. Piaget et de ses collaborateurs. En effet, nous l’avons déjà noté, la théorie piagétienne apporte un cadre cohérent et structurant pour notre étude. L'enfant est pris en compte dans une perspective interactionniste c'est-à-dire que nous approchons l'enfant en interaction avec son milieu. Le milieu sollicite l'enfant mais à aucun moment il n'agit à sa place. Cette conception s’oppose au modèle comportementaliste du stimulus/réponse puisqu’aucune réponse précise n'est attendue de la part du sujet. C'est sa propre pensée qui présente un intérêt.

D'autre part, certaines épreuves piagétiennes nous semblent intéressantes pour mettre au point notre protocole d'investigation.

Et pour finir, c'est en référence à certaines données théoriques piagétiennes telles que l'adaptation, l'équilibration, la dialectique figuratif / opératif, la causalité,... que nous effectuerons l'analyse des protocoles que nous recueillerons.

Notes
95.

J-M Dolle, 1989, p. 84

96.

J-M Dolle, 1889, p. 87-88

97.

J-M Dolle, 1889, p. 83