II . GENÈSE DE L’IDENTITÉ : CARACTÉRISTIQUES DE CHAQUE NIVEAU

Explorons, dans l’exposé théorique qui suit, les processus sous-jacents aux manifestations précédemment répertoriées.

a . LE NIVEAU 1 : l'objet est assimilé aux schèmes de l'action

Vers l'âge de 3 ans, on observe chez les enfants une tendance primaire à l'identification, tendance qui diminuera par la suite. Les sujets, qui sont en présence de l'objet, pensent à ce que l'on peut en faire et l'identification porte alors avant tout sur le schème d'assimilation de l'action. Piaget écrit qu'avant « ‘l'identité individuelle... il y a pour chacun de ces objets une forme primitive d'identification que l'on peut appeler « l'assimilation à un schème d'action » : les perles sont à enfiler en collier, l'eau est à boire ou à verser, la pâte et le fil de fer à manipuler... Cette identification revient à définir les objets par rapport à l'usage que l'on en fait. C'est, semble-t-il, un point de vue, à mi-chemin du générique et de l'individuel, qu'il peut y avoir identification précoce, d'autant plus qu'il s'agit ici en fait des mêmes objets ’».99

Cette assimilation est un peu plus générique qu'une identification proprement individualisée. En fait, l'identification primaire est rarement pure et se présente surtout sous la forme d'un mélange irrégulier d'identification et de différenciation.

Une distinction reste primordiale : les identifications précoces ne sont pas des conservations puisque les sujets de ce niveau nient précisément la quantité. Par exemple, le sujet sera capable d'identifier la qualité couleur (rouge / bleu), mais ne parvient pas à identifier une quantité telle que l'intensité de la qualité couleur (plus rouge / moins rouge).

Cette réflexion amènera par la suite à distinguer deux types de propriétés :

  • les propriétés qualitatives

  • les propriétés quantitatives

Après ce niveau 1, l'enfant peut accéder soit au niveau 2, soit directement au niveau 3. Cette transition ne semble pas être aléatoire mais liée de près à la situation.

  • Passage du niveau 1 au niveau 2
    Piaget explique ce passage à l'aide d'une « ‘décentration sur l'objet, telle que, cherchant à passer de l'identification par assimilation semi-générique à l'identification proprement individualisée, le sujet découvre l'importance des changements entre un état E1 et un état E2 et en vient alors à nier l'identité de cet objet’ ».100 . On assiste à un recul de l'identification au profit d'une accentuation assez systématique des différences liées à la transformation subie.

  • Passage du niveau 1 au niveau 3
    Ce passage consiste à « ‘dégager les caractères stables de l'objet, qui ne sont pas encore des invariants de transformations (conservation), mais simplement des caractères statiques et inchangés (la nature de la matière dont est faite l'objet, sa couleur, etc. ) ; en ce cas, le sujet passe directement à une identification individualisée’ ».101

Notes
99.

Piaget, 1968, p. 9

100.

Piaget, 1968, p. 9

101.

Piaget, 1968, p. 10