e . L'Évolution de l'identitÉ qualitative vers l'identitÉ quantitative

Une étude qui se préoccupe de la manière dont les enfants accèdent ou non à la quantification doit s'attacher à la définition des divers termes employés pour parler de la qualité et de la quantité. Pour cela, nous nous sommes référés au dictionnaire « le Robert ». La définition de la qualité renvoie aux termes attributs, caractères, propriétés. « Qualitatif » désigne tout ce qui est relatif à la qualité, qui est du domaine de la qualité (et non des choses mesurables).

Nous retiendrons ici deux sens du terme quantité. Le sens courant la définit comme étant un nombre d'unités ou de mesures qui sert à déterminer une collection de choses considérées comme homogènes ou une portion de matière. Dans le domaine des sciences, elle est la propriété de la grandeur mesurable ; la chose même qui est susceptible d'être mesurée. On distingue les quantités continues, qui ne sont pas composées d'éléments naturellement distincts, des quantités discontinues, discrètes, élaborées par l'esprit en partant d'éléments donnés. Nous retenons que ce qui différencie la qualité de la quantité est la notion de mesure.

Pour Claude Bernard « ‘l'étude qualitative des phénomènes doit nécessairement précéder leur étude quantitative’ ».

Le passage du qualitatif au quantitatif est lié à la comparaison, à la mise en relation. Ce fonctionnement est du domaine logico-mathématique et est lié au lien causal conscient. Le domaine quantitatif porte sur un contenu lié aux conservations et est donc lié au domaine infra-logique.

‘« Au cours de la période sensori-motrice, l'enfant a acquis une « conservation qualitative élémentaire » en constituant la permanence de l'objet ce qui correspond à une première forme du principe de l'Identité ».108.’

Le choix du matériel expérimental est très important pour permettre d'appréhender ces deux types d'identités et pouvoir analyser les processus d'identification qui y conduisent. L'aspect qualitatif des critères semble favoriser une lecture perceptive et une énumération des critères peut alors suffire. Par contre, l'aspect quantitatif suppose une construction pour être réellement traité avec une valeur quantifiable. Il implique une composition de critères pour pouvoir se justifier (ex : composition des dimensions permettant de justifier l'égalité de volume). Ainsi, un leurre qualitatif déstabilisera des enfants dont la construction quantitative n'est pas achevée (ex : même niveau de liquide mais contenants de sections différentes). D'autre part, la quantité pourra être traitée comme une qualité (« c'est grand » au même titre que « c'est rouge ») sans être capable de situer la taille sur un continuum de valeurs.

Il ne faut pas être dupe du vocabulaire employé par le jeune enfant et calquer sa signification sur celle que lui attribue l'adulte. Des expressions telles que « grand, large, foncé, lourd... » sont assimilés à des qualités pour l'enfant alors que le langage adulte les considère comme permettant de décrire des quantités, au sens où elles permettent de situer l'objet sur un continuum de valeurs. De même, lorsque le sujet commence à percevoir des intensités en termes de « plus » ou de « moins », il ne perçoit au début que des différences de qualités.

Lorsque l'identification porte sur des objets à forte prégnance quantitative, il semble que ce soient les mises en correspondance, à travers une lecture figurative simultanée des états en présence, qui soient favorisées par rapport aux mises en relation, au sens où, les propriétés doivent être construites par le sujet.

La ressemblance quantitative nécessite plus de construction que la différence qui est plus facilement repérable à l'aide de critères perceptifs. La ressemblance, en termes de conservation, suppose dans tous les cas une construction, tandis que l'inégalité quantitative peut être traitée de façon perceptive. Par contre, l'égalité quantitative implique des mises en relations.

A ce stade de notre recherche, il faut se poser les questions suivantes pour tenter d'y répondre.

Notes
108.

Piaget, G. Lerbet, 1970, p. 34