M. Deleau définit l’évaluation comme une «mesure des effets propres d’une politique» 392 tandis que P. Viveret la considère comme «un jugement porté sur la valeur des politiques publiques» 393 . Pour J-P. Nioche et R. Poinsard, l’évaluation se situe en amont et en aval des politiques publiques 394 :
Quant aux fonctions de l’évaluation des politiques publiques, F. Rangeon et al. 397 en distinguent trois, à savoir :
D’après le Conseil Scientifique de l’Evaluation 399 , l’évaluation des politiques publiques permet, à une organisation publique, de rendre des comptes de sa politique et de ses effets à une autorité d’un niveau supérieur et/ou aux citoyens. Ensuite, l’évaluation amène cette organisation à repartir ses ressources de manière plus rationnelle. Enfin, l’évaluation prépare la décision concernant la poursuite, l’arrêt ou la refonte de la politique mise en place par l’organisation publique.
Dans plusieurs pays 400 notamment en France, la réforme de l’Etat et de ses institutions publiques forme le leitmotiv des discours de nombreux acteurs administratifs et politiques qui ont fait de l’évaluation leur principale ligne de force. La mobilisation de ces acteurs est en réalité, soutenue par plusieurs textes législatifs.
Dans le journal officiel du 24 février 1989 par exemple, l’évaluation apparaît comme un devoir démocratique où l’autonomie, la transparence ainsi que la responsabilité représentent ses principaux piliers. Il est écrit dans ce journal qu’il «ne peut y avoir ni autonomie sans responsabilité, ni responsabilité sans évaluation, ni évaluation sans conséquence» 401 .
Le décret n°90-82 est apparu le 22 janvier 1990 pour institutionnaliser l’évaluation en France. En effet, un dispositif national d’évaluation des politiques publiques s’est mis en place. Ce dispositif est composé du Fonds National de Développement de l’Evaluation, «du Conseil Scientifique de l’Evaluation et du Comité Interministériel de l’Evaluation qui ont des tâches de coordination des actions et qui contrôlent le processus de qualité et la méthodologie de l’évaluation» 402 .
Deux circulaires, l’une datée du 09 décembre 1993 403 et l’autre rendue publique le 13 juillet 1994 404 , viennent compléter le mouvement de réforme qu’a connu le paysage administratif et politique en France. Selon ces circulaires, la modernisation du service public et la rationalisation des dépenses publiques doivent être le pivot de toute action politique. Comme le souligne S. Trosa, «le secteur public doit se moderniser dans sa gestion, de plus il doit améliorer la transparence de son activité et sa capacité à rendre des comptes» 405 . Il s’agit notamment de renforcer le lien existant entre la motivation au travail et les résultats en terme de performance.
Il est vrai que l’application de ces textes législatifs a rendu l’évaluation des politiques publiques plus fréquente. Cependant, le Conseil Scientifique de l’Evaluation constate que les organisations publiques se sont éloignées des objectifs de la réforme. Les résultats rendus publics par le conseil, révèlent que la dimension financière de l’évaluation demeure marginale. En outre, la relation entre les moyens et les effets des actions publiques n’est pas clairement justifiée. E. Monnier remet en cause l’utilité des dispositifs d’évaluation construits. Comme le constatent K. Cabatoff et J-Y. Bion, les résultats de ces dispositifs ne se situent pas dans une perspective d’aide à la décision et d’orientation de stratégies.
Afin de résoudre ces obstacles méthodologiques en matière d’évaluation, les travaux de recherche en politique publique se sont désormais orientés vers le management public dont les outils et la démarche sont exposés ci-dessus.
M. Deleau et al., Evaluer les politiques publiques : méthodes, déontologie, organisation, rapport pour le Commissariat Général du Plan, Paris : La Documentation Française, 1986.
P. Viveret, L’évaluation des politiques et des actions publiques, rapport au Premier ministre, Paris : La Documentation Française, 1989.
J-P. Nioche, op.cit., pp. IX-XI.
A. Kupiec, op. cit..
S. Trosa, op. cit.;
F. Rangeon, op. cit..
F. Rangeon, op. cit, p. 25.
Conseil Scientifique de l’Evaluation, op. cit..
Des articles récents parus dans la revue Politiques et Management Public offrent un panorama général des modèles de réforme connus dans le paysage administratif et politique de plusieurs pays. Nous citons à titre d’exemple, l’article de P. Keraudren (Vol.17, n°1, mars 1999) pour le modèle britannique. L. Chaty (Vol.17, n°2, juin 1999) et M. Lobet (Vol.17, n°4, décembre 1999) proposent dans leurs articles des études comparatives de plusieurs reformes récemment engagées par les politiques publiques dans différents pays européens.
A. Kupiec, Bibliothèques et évaluation, Ed. du cercle de Librairie, 1994, p. 22, 197p..
S. Dalhoumi, op. cit.
Circulaire interministérielle relative à la mise en œuvre de la démarche d’évaluation dans les procédures contractuelles.
Circulaire du Premier Ministre relative au plan de modernisation des procédures financières au service de la déconcentration.
S. Trosa. «La modernisation est-elle évaluable ?», in : Politiques et management public, vol.10, n°4, décembre 1992, p. 66, pp. 65-83.