3.1.3.1- Des missions communes

La synthèse de la littérature professionnelle 579 , 580 nous conduit à distinguer quatre missions qui semblent être communes aux Bibliothèques universitaires et aux Bibliothèques publiques. Il s’agit :

  • de contribuer à la formation initiale des usagers en leur offrant un accès à la culture et au savoir : cette mission est essentielle pour les Bibliothèques universitaires. Elle consiste à aider l’étudiant à construire son affiliation disciplinaire et à compléter l’enseignement qu’il reçoit pour lui permettre de se l’approprier. En France, les Bibliothèques universitaires sont, à des degrés différents, intégrées aux projets pédagogiques de leurs universités ; elles développent traditionnellement des services relatifs à la fourniture des documents couvrant un ou plusieurs champs disciplinaires.

Leur but est de répondre le mieux possible aux besoins d’apprentissage de leurs différents publics visés (étudiants des trois cycles, enseignants et chercheurs).

A l’Université des Sciences Sociales de Toulouse I 581 , par exemple, les bibliothécaires du service commun de documentation ont l’habitude de travailler en relation étroite avec les enseignants-chercheurs, pour l’acquisition des documents liés à l’enseignement supérieur dispensé dans cette Université. Le travail de partenariat entre les bibliothécaires et les enseignants peut revêtir d’autres formes. Il s’agit, à titre d’exemple, de constituer des bibliographies sélectives de documents qui seront consultables par les étudiants à la Bibliothèque. Il s’agit également, de réfléchir sur les travaux que les étudiants seront amenés à faire sous la direction du corps enseignant et qui nécessitent le recours aux ressources documentaires de la Bibliothèque.

La formation initiale est aussi une mission essentielle pour de nombreuses Bibliothèques publiques dont le rôle consiste précisément, à compléter l’enseignement primaire, secondaire ou universitaire dispensé dans les différents établissements de la commune (écoles, lycées ou universités). Comme dans les Bibliothèques universitaires, on offre dans les Bibliothèques publiques des services de plus en plus personnalisés aux étudiants du premier et du second cycle.

B. Calenge 582 cite comme exemples de services la formation à la recherche documentaire et l’assistance personnalisée à la constitution de bibliographies et/ou d’exposés. Les Bibliothèques publiques entendent également contribuer à la formation initiale des apprentis en fournissant des collections pluridisciplinaires susceptibles d’élargir la connaissance qu’ils reçoivent dans leurs établissements. Cependant, le développement de ces collections s’appuie davantage sur la collaboration des établissements d’enseignement d’une part et des maisons d’édition d’autre part, pour décider l’acquisition des livres 583 .

  • d’assurer la formation continue de salariés ou de demandeurs d’emploi qui veulent améliorer leurs connaissances et leurs compétences. Les Bibliothèques universitaires préparent les étudiants à l’insertion professionnelle et à la prospection d’emploi. Elles accompagnent de fait, la politique des différentes composantes de l’Université qui proposent des formations professionnalisées : c’est le cas typique des formations dispensées par les Instituts Universitaires de Technologies en France ou encore des formations de DESS 584 qui sont proposées par les départements de recherche de l’Université pour se rapprocher du monde des entreprises.

Les Bibliothèques publiques contribuent à la formation continue par la fourniture de collections et des services susceptibles d’accompagner les programmes des organismes de formation continue et de contribuer au développement des démarches d’autodidactes. Citons à titre d’exemple, l’accès à des publications locales susceptibles d’informer le chercheur d’emploi des offres existantes et d’orienter sa recherche d’embauche. De surcroît, les bibliothécaires jouent un rôle d’encadrement des autodidactes de plus en plus important dans la mesure où ils développent des collections de documents (relatives à l’informatique, aux techniques, aux sciences, etc.) pouvant aider les personnes à entreprendre par eux-mêmes des démarches d’auto formations professionnelles.

  • de contribuer au développement de la recherche scientifique, en assurant l’actualisation et le développement des connaissances scientifiques et techniques : cette mission est évidente pour les Bibliothèques universitaires qui offrent d’ores et déjà trois types de services : la diffusion d’information personnalisées, la formation à la recherche de l’IST et l’assistance des étudiants (deuxième et troisième cycles) à la consultation des bases et banques de données à distance.

De même, les Bibliothèques universitaires orientent les chercheurs vers des sources d’information externes par le biais du service de PEB 585 et de l’Internet. Dans une moindre mesure, les Bibliothèques publiques contribuent au développement de la recherche par la constitution de fonds thématiques spécialisés (histoire, médecine, philosophie, etc.) et la mise à la disposition du public des matériels de recherche d’information (salles multimédias, accès à l’Internet, etc.).

  • de remplir une mission patrimoniale qui consiste à conserver le fonds ancien de la Bibliothèque et de le communiquer aux générations présentes et futures. T. Giappiconi et P. Carbone 586 indiquent que les Bibliothèques publiques en France conservent plus de 8 millions d’imprimés, tandis que P. Casseyre 587 remarque que la demande de crédits établis par les Bibliothèques universitaires pour la sauvegarde de leur patrimoine est devenue pressante. Cet auteur cite l’exemple de laBibliothèque Inter Universitaire de Médecine de Paris 588 «des actions à la fois de conservation et de valorisation ont été entreprises, en particulier : la restauration de livres anciens, la reliure des thèses du XIXe siècle, l’achat de densitomètres pour microfilms, l’achat d’humidificateurs » 589 .

Quant à la politique d’acquisition documentaire, l’Association Américaine des Bibliothèques 590 affirme que les actions de toutes les Bibliothèques doivent obéir aux cinq principes fondamentaux suivants :

  1. « Aucun ouvrage, ou autre type de matériel, ne saurait être exclu du fait de l’origine, du passé ou des opinions de ceux qui ont contribué à sa création ;
  2. aucun ouvrage, ou autre type de matériel ne saurait être proscrit ou éliminé pour des motifs partisans ou doctrinaires.
  3. Les Bibliothèques doivent s’opposer activement à la censure dans l’accomplissement de leur mission informative et éducative.
  4. Elles doivent coopérer avec tous les groupes et les individus qui luttent pour le respect du droit à la liberté d’expression et au libre accès aux idées.
  5. Le droit d’utiliser la Bibliothèque ne saurait être refusé à personne [quelque soit] son origine, son âge, son passé ou ses opinions »H. Ballour  M. Kuhlmann et N. Kuntzmann. Censure et Bibliothèques au XXe siècle, Paris : Ed. du Cercle de la librairie, 1989..

Notes
579.

E. Cohen. « Les universités françaises : urgences et missions », in : Bulletin des Bibliothèques de France, 1996, t.41, n°2, pp. 8-11.

580.

T. Giappiconi et P. Carbone, op. cit., 1997.

581.

M-D. Heusse et B. Saint-Girons, « Partenariat dans l’université de Toulouse I : vers un nouveau modèle d’organisation », in : Bulletin des Bibliothèques de France, t.44, n°4, 1999, pp. 27-30.

582.

B. Calenge, Accueillir, orienter, informer : l’organisation des services aux publics dans les Bibliothèques, Paris : Electre, 1999.

583.

Dans une perspective de développement du livre et de la lecture, les Bibliothèques publiques choisissent les best-sellers à acquérir selon leur qualité et leur intérêt intellectuel. Pour compléter les établissements d’enseignement, les Bibliothèques proposent davantage une littérature qui enrichit la culture livresque et la pensée de leur public et organisent des rencontres avec des écrivains ou de poètes.

584.

Il s’agit d’une formation professionnelle destinée à des étudiants de troisième cycle qui s’appuie sur les stages et s’achève par l’obtention d’un diplôme d’études supérieures spécialisées.

585.

Prêt Entre Bibliothèques

586.

idem.

587.

P. Casseyre, « Universitaires : l’exemple de la BIUM : la fonction patrimoniale des Bibliothèques », in : . Diriger une Bibliothèque d’enseignement supérieur, Presses de l’université du Québec, 1995, pp. 297-302.

588.

La BIUM est la Bibliothèque Inter Universitaire de Médecine de Paris qui possède plus d’un million de volumes (dont 106 incunables, plus de 3 000 ouvrages du XVIe siècle, plus de 6 000 ouvrages du XVIIe siècle), plus de 20 000 titres de périodiques ainsi que toutes les thèses de médecine de Paris (depuis 1939) et de Provence (depuis XIXe siècle).

589.

P. Casseyre, op. cit., p. 298.

590.

American Library Association (ALA).