4.1.1- La prise en compte de la spécificité d’organisation des Bibliothèques françaises

Le premier chapitre nous a montré que les organisations publiques sont restées, à des degrés divers, sous l’emprise de la bureaucratie. Nous avons à cet égard, noté la particularité du statut de la fonction publique qui laisse peu de possibilités d’action aux différents acteurs (personnel et dirigeant) d’une organisation publique pour mener un véritable management participatif. Car, nous assistons souvent à une double hiérarchie qui règle le fonctionnement des organisations publiques : une hiérarchie fonctionnelle et une hiérarchie politique.

Ainsi, pour une Bibliothèque universitaire ou publique, l’hiérarchie fonctionnelle est constituée par le directeur, les chefs de sections ou de départements et les autres catégories de personnels (bibliothécaires et magasiniers auxquels on accorde des tâches selon leur niveau statutaire et en fonction de l’évolution de leur carrière). Son hiérarchie politique est constituée du maire (dans le cas d’une Bibliothèque publique) ou du président de l’université (pour une Bibliothèque universitaire), des conseillers (pour une Bibliothèque publique) ou de chefs de services et départements (dans le cas d’une Bibliothèque universitaire) et des représentants de la Bibliothèque.

Dans un autre registre, de par l’étude des organisations privées et des organisations publiques, nous avons noté la situation paradoxale que vivent aujourd’hui  les Bibliothèques.

  • D’une part, la complexité de la gestion humaine résultant des règles statutaires ne contribue pas à une meilleure participation de tout le personnel dans la prise de décision. La connaissance du cadre institutionnel des Bibliothèques, nous permet de constater que la décision est fortement centralisée dans ce milieu parce que la marge de manœuvre des personnels s’inscrit dans le rôle qui leur est défini par les textes juridiques.
  • D’autre part, la crise économique associée au progrès technologique a donné lieu à une exigence de rationalisation et d’amélioration des performances, d’où le besoin de mettre en place des systèmes de planification dans les organisations publiques. Comme nous l’avons noté dans le second chapitre, la planification prend en compte les dimensions internes et externes de l’organisation ; elle conduit à une réflexion prospective sur le devenir de l’organisation et à la définition d’objectifs précis à atteindre. Son application qui amène à une gestion plus transparente et plus proche de la réalité de l’organisation nécessite la mise en place préalable d’un projet connu et approuvé par tous les acteurs où les objectifs sont clairement définis, les stratégies qui en découlent sont formalisées et les responsabilités et l’échéancier sont précisés.

L’enjeu actuel des Bibliothèques est donc, d’avoir une stratégie claire, de déterminer les objectifs d’une façon précise et d’impliquer tout le personnel dans la planification et le pilotage.

En l’absence d’exemples d’expériences de planification conduits en Bibliothèque, est-il correcte de dire que les bibliothécaires mènent des politiques sans conviction quant à leur impact alors qu’ils manifestent une réelle volonté de s’intégrer dans leur environnement ?

Nous avons perçu cette volonté dans le dialogue existant entre les bibliothécaires et leurs tutelles au travers des réunions de communication et de concertation. Nous pensons que ce dialogue est mobilisateur et riche en retombées. En effet, la réflexion collective entre ces acteurs, portant sur le budget et les orientations générales de la Bibliothèque, contribue non seulement à intégrer la Bibliothèque dans son environnement, mais aussi à faire connaître les problèmes de celle-ci. Car, l’exigence de répondre au mieux à des besoins toujours plus nombreux et la nécessité de gérer des contraintes financières de plus en plus tendues ont donné lieu à un changement dans les activités attribuées aux bibliothécaires. Nous avons noté ce changement au travers de quelques exemples illustrant l’évolution des services et des compétences des personnels. C’est justement, cette évolution rapide qui amène les bibliothécaires à penser leur organisation en termes d’objectifs et d’impacts. Mais, nous ne savons pas si leurs démarches sont formalisées.