5.2 - L’aspect opérationnel du dispositif d’évaluation

La planification des actions de la Bibliothèque de l’ENSSIB et de la Bibliothèque Municipale de Fresnes constitue une base de connaissances inéluctable à partir de laquelle, il nous a été possible d’envisager des dispositifs d’évaluation pertinents pour ces deux établissements. A la présence de stratégies de développement et de conditions d’appréciations, s’ajoute l’existence d’outils opérationnels pour soutenir durablement les bibliothécaires dans leur démarche d’appréciation.

Le socle d’indicateurs que nous avons proposé pour l’évaluation de leurs performances montre la complexité de sa mise en œuvre. Cela suppose en effet, un traitement régulier de données issues de sources variées. Par ailleurs, la réflexion stratégique sur les MOFF des deux Bibliothèques met en évidence l’importance du renseignement pour l’appréciation des systèmes de planification en vigueur. Cela suppose la disponibilité d’unSI qui soutient l’analyse, l’interprétation et la validation des informations prioritaires.

Pour ces raisons, nous poursuivons la réflexion sur les dispositifs d’évaluation en abordant précisément, dans ce dernier chapitre, la question de la faisabilité technique de ces dispositifs : Les résultats de l’enquête présentés dans le troisième chapitre nous permettent d’affirmer que l’alternative viable pour les bibliothécaires français, partageant les mêmes préoccupations d’utilisation d’informations utiles, est d’adopter un SIAD dont les fonctionnalités recommandées par les bibliothécaires interrogés sont le recueil de données, le calcul des indicateurs de performance et la présentation des résultats par des tableaux et de représentations graphiques. Mais, nous nous heurtons à un problème de choix, car les données qui peuvent être traitées par le SIAD sont multiples, voire complexes.

Compte tenu des limites que nous avons relevées dans l’expérience européenne (i.e. projets CAMILE), concernant la conception d’un SIAD pour les Bibliothèques, nous choisissons de concevoir un prototype de SIAD traitant un seul type de données. Il s’agit des données relatives à la consultation sur place des Bibliothèques. Nous privilégions l’étude de cet aspect pour cinq principaux facteurs :

La valeur d’une Bibliothèque dépend de l’usage de ses services et de ses ressources. Ainsi, il est aussi important d’évaluer la qualité du service rendu par l’établissement que d’apprécier son utilisation réelle. Il s’agit dans ce dernier cas, de mesurer la fréquence d’usage de tous les services et de toutes les ressources qui sont accessibles aux utilisateurs, que ce soient sur place ou en différé (i.e. accès en ligne et/ou à domicile) ;

A. Girard-Billon 868 constate qu’en France, la consultation sur place n’est pas comptabilisée dans la plupart des Bibliothèques alors que l’horaire d’ouverture de ces établissement a sensiblement augmenté. D’ailleurs, les résultats de notre enquête destinée aux bibliothécaires français, confirment ce fait. Aujourd’hui, les Bibliothèques accueillent des publics nouveaux sans restriction d’accès particulières 869 (c’est-à-dire sans abonnement). Ces publics utilisent sur place les ressources documentaires, leurs installations (salles, tables, postes informatisés) et leurs services de renseignement et de référence. Il est nécessaire dès lors, d’évaluer l’utilisation de la Bibliothèque par ces publics. Par ailleurs, il ressort de notre enquête que la majorité des bibliothécaires français ne dispose pas d’outils pour contrôler aisément les activités des utilisateurs au sein de leurs établissements et d’expliquer par conséquent, les motifs de leur fréquentation.

Nous distinguons deux types d’usage des ressources documentaires dont le premier s’avère mieux apprécié que le second : la circulation des documents et leur consultation sur place. Il ressort en effet, des études américaines que 75% des documents empruntés sont également consultés sur place. A l’utilisation sur place de ces ressources empruntables, s’en ajoutent d’autres qui sont exclus du prêt. B. Calenge 870 cite quatre types de documents qui sont exclusivement réservés à la consultation sur place : les documents rares (i.e. anciens et précieux), les documents de consultation ponctuelle (dictionnaire, encyclopédie, quotidien, etc.), les documents dont les conditions juridiques d’achat interdisent le prêt à domicile et les exemplaires de documents exclus du prêt. En raison de leur coût, il devient nécessaire d’évaluer l’usage de ces ressources.

  1. L’évolution des travaux du projet EQUINOX montre que l’évaluation des ressources électroniques est plus nécessaire que jamais. Cependant, C. McClureC. McClure, op. cit., 1999. souligne la difficulté de sa mise en œuvre, de par la diversité de ces ressources. A ce titre, P. YoungYoung, P. « L’évaluation des services électroniques en Bibliothèque : les statistiques à l’âge du numérique », in : Bulletin des Bibliothèques de France, n°3, 1998. stipule que le calcul du nombre des connexions et de leur durée d’une part, et l’identification des utilisateurs éloignés par des mots de passe d’autre part, sont des mesures insuffisantes, bien qu’elles soient utiles. En effet, ces mesures ne tiennent pas compte de toute la panoplie des ressources électroniques qui pourrait exister en Bibliothèque (mais simplement des documents électroniques présentés dans son site web sous forme de signets). De même, elles ne peuvent pas justifier, à elles-seules, ni les investissements placés par les Bibliothèques en nouvelles technologies, ni la charge du travail imputé au personnel en matière d’information et de formation. C’est dans ce sens qu’il convient d’évaluer également la consultation sur place des ressources électroniques. Cette évaluation complémentaire devrait contribuer à cerner les besoins d’encadrement et d’information des utilisateurs des ressources électroniques.
  2. L’expertise américaine concernant l’évaluation de la consultation sur place des Bibliothèques, réalisée par le programme GéoLib du département du FREAC (et décrite dans le deuxième chapitre), nous a paru pertinente sur les plans méthodologiques et technologiques. En effet, les auteurs de ce programme ont élaboré trois grilles d’enquêtes déterminant les différentes formes d’usage qu’on pourrait apprécier dans une Bibliothèque. Ces grilles qui peuvent être régulièrement complétées, grâce au système APEX conçu par les auteurs du programme GéoLib nous ont paru transposables aux cas de la Bibliothèque de l’ENSSIB et de la Bibliothèque Municipale de France.

Dans ce chapitre, nous présenterons les conditions d’adaptation des grilles utilisées par le programme GéoLib au contexte de nos deux Bibliothèque. Il sera question de déterminer les types de consultation sur place en fonction des spécificités de chacune. Par la suite, nous indiquerons les contraintes apparues au cours de l’expérimentation du SI nord-américain dans les deux Bibliothèques et nous tenterons de les contourner, en proposant un prototype de SIAD dont les principales fonctionnalités seront illustrées et critiquées, à la fin de ce travail.

Notes
868.

A. Girard-Billon, op. cit., 2000.

869.

à l’exception de quelques unes notamment la Bibliothèque Nationale de France.

870.

B. Calenge, op. cit., 1999.