2- Une compréhension du concept de représentation.

Si Moscovici (1986) S considère les représentations sociales d’un objet (au sens sociologique du terme) “comme l’organisation durable de perceptions et de connaissances relatives à un certain aspect du monde de l’individu ”, on dépasse l’univers des opinions et des croyances décrits par René Kaës (1972) R , pour se rendre à l’évidence que “la représentation est une modalité de connaissances particulières, expression spécifique d’une pensée sociale” (Herzlich 1975 C 0 ) qui s’inscrit dans une chronologie de l’histoire de l’homme et de l’espace social déterminé qu’est l’Ecole.

Prolongeons la réflexion sur ce concept de représentation. Il désigne la faculté qu’a un individu d’évoquer, d’exprimer une abstraction par un symbole. Nous excluons d’emblée la définition physique qui n’a pas d’intérêt pour notre propos.

Nous pouvons donc parler des objets ou des phénomènes culturels “les motivations”, “l’exercice du métier” “l’avenir du désir initial” comme constructions qui empruntent à la fois à des éléments de réalité, mais aussi à des éléments symboliques, liés, d’une part, à notre perception J 1 de cette réalité et, d’autre part, à nos pratiques culturelles. En d’autres termes, le fait de souhaiter quitter l’enseignement du premier degré est une réalité physique dans la mesure où il est matérialisé par des exemples d’anciens instituteurs qui ont quitté l’enseignement. Il fait également partie de la symbolique, dans la mesure où il renvoie la personne au contact avec sa réalité à un imaginaire qu’il se construit par rapport à son histoire et à sa manière de percevoir la réalité. L’individu construira donc une partie de sa représentation de la volonté de quitter l’enseignement du premier degré en fonction de sa propre pratique culturelle.

Les études sur la perception, quant à elles, révélent que percevoir la réalité n’est pas exclusivement recevoir mais également comprendre. Cette nécessité de compréhension d’un événement ou d’un fait est donc fortement liée à l’intérêt de la représentation, que nous lui conférons en fonction de notre histoire de vie. La représentation est une forme de connaissance de la réalité, par le truchement de laquelle celui qui connaît se replace dans ce qu’il sait.

La représentation de la volonté de quitter l’enseignement pour chaque maître sera fonction de sa propre histoire de vie. Il y a nécessité d’aller au delà de la simple perception du phénomène, pour en saisir une signification intelligible. La représentation est à considérer comme un intermédiare entre l’objet de connaissance extérieur et l’univers mental d’un individu se référent à ce qu’il considère comme réel. Il y aura donc dans l’absolu autant de représentations sociales du désir de quitter l’enseignement qu’il existe d’individus. Nous sommes en quelque sorte dans le registre des opinions, qui échappent à l’examen critique pour se transformer en croyances ou approbations qui, d’une part, peuvent comporter des degrés allant de la simple impression à la certitude et, d’autre part, portent sur la réalité ou la vérité d’un savoir selon une plus ou moins grande probabilité. Pour Moscovici S 2 la représentation “est un processus de médiation entre le concept et la perception”.

Notes
S.

. Moscovici, L’ère des représentations, in W. Doise, A. Palmonari (eds), L’étude des représentations sociales, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1986.

R.

. Kaës, Inconscient et culture, collection dirigée par René Kaës et Didier Anzieu, Paris, Dunod, 1972.

C.

. Herzlich, Santé et maladie : analyse d’une représentation sociale, Paris, La Haye, Mouton, 1975.

J.

. Stoezel, La Psychologie sociale , (Chapitre VII notamment), Edition Flammarion ,1963.

S.

. Moscovici, La Psychanalyse, son image et son public, Edit. PUF, 1961, Chap. 1.