1- La perception d’une absence de consensus sur les missions de l’enseignement.

Les finalités de l’école élémentaire n’ont pas fondamentalement changé depuis que le premier degré n’est plus un cycle se suffisant à lui-même, couronné par le certificat d’études primaires.

Pour une grande partie des maîtres, “apprendre à lire, à écrire et à compter” reste le premier des objectifs (il est cité par 41 % d’entre eux). Il s’assortit d’une ambititon complémentaire, celle de donner aux enfants le goût du savoir (32 % le citent).

Cette relation privilégiée à la transmission des savoirs ne laisse pas beaucoup de place aux objectifs de socialisation. Il reste peu d’enseignants pour mettre en avant l’objectif de développement de l’autonomie (16 %) et, plus surprenant, peu nombreux sont ceux qui pensent que le rôle de l’école est de former des citoyens (11 %), malgré toutes les directives ministérielles actuelles concernant l’éducation à la citoyenneté.

Les maîtres sont manifestement mobilisés par les valeurs les plus professionnelles de leur métier et peu enclins, aujourd’hui, à cultiver la mission civique, qui a mobilisé ceux du début du siècle. Leur ambition est de se fondre dans la grande corporation des enseignants, d’être, comme tous, des auxiliaires privilégiés de la transmission des connaissances. Loin d’être des nostalgiques de l’école de Jules Ferry, ils souhaitent plutôt devenir des professeurs parmi d’autres, dans un vaste système éducatif sans barrières. Leur responsabilité professionnelle leur apparaît aussi importante que celle des professeurs du second degré.

Les objectifs cardinaux de l’enseignement élémentaire.

Sa finalité est plus affirmée à l’école élémentaire qu’en maternelle. Toutefois même en maternelle, beaucoup font de l’apprentissage des savoirs de base la mission de l’école. Si leur vision diffère de celle de l’élémentaire, c’est dans l’accent mis sur l’éveil au savoir : près des deux-tiers estiment que leur première fonction est de donner aux enfants le goût de savoir (59 %), beaucoup plus que de développer leur autonomie (24 %).

On doit souligner l’homogénéïté de la vision des différentes générations d’instituteurs sur la question des objectifs de l’école. Bien que l’objectif premier soit plus affirmé par les plus anciens, dans toutes les classes d’âge la majorité se réfère de manière privilégiée aux savoirs de base.

Cet antagonisme entre les différentes conceptions du système éducatif illustre ainsi sur le plan théorique le relatif sentiment d’isolement des enseignants.