I.2. Reconnaissance du visage et caricature

Une caricature est définie comme une exagération des traits distinctifs qui individualisent le visage d'une personne donnée (Perkins, 1975). Rhodes, Brennan et Carey (1987) ont généré, par ordinateur, des caricatures de visages véridiques en reliant par des lignes les coordonnées de 169 points spécifiés sur chaque visage. A partir de ces coordonnées, ils ont calculé une norme en moyennant l'ensemble des visages (ce qui revient, en quelque sorte, à extraire un visage prototypique). Des caricatures ont ensuite été créées en augmentant de manière proportionnelle les distances entre les traits d'un visage donné et la norme. Cette manipulation exagère les traits du visage qui sont éloignés de la norme, c'est à dire les traits distinctifs. Des "anti-caricatures" peuvent aussi être créées en diminuant ces distances. Rhodes et al. (1987) ont alors observé que les caricatures sont reconnues plus rapidement que les visages d'origine, ceux-ci étant eux-mêmes reconnus plus rapidement que les anti-caricatures. L'influence bénéfique de la caricature sur la reconnaissance du visage a été observée à plusieurs reprises (Benson & Perrett, 1991, 1994 ; Calder, Young, Benson, & Perrett, 1996 ; Rhodes & Moody, 1990 ; Stevenage, 1995a, 1995b). Par contre, comme pour l'effet de distinctivité, l'effet de caricature est inversé sur les tâches de classification : les caricatures sont plus longues à classer comme appartenant à la catégorie des visages (Stevenage, 1995a).

L'effet de caricature peut, à bien des égards, être rapproché de l'effet de distinctivité. La principale différence est que la distinctivité concerne des différences entre individus, certains étant moins similaires à la moyenne des visages que les autres. La caricature touche un seul est même individu dont les traits distinctifs ont été exagérés. Dans les deux cas, cependant, l'effet s'explique par l'exagération des différences par rapport à un visage d'origine. Ces deux effets sont donc expliqués par l'existence d'un prototype facial (Rhodes et al., 1987 ; voir aussi Valentine, 1991). Par exemple, Rhodes et al. (1987) ont interprété l'effet de caricature en supposant que les visages sont encodés par leurs aspects distinctifs en référence à un visage norme ou moyen. L'accentuation de ces aspects distinctifs favoriserait alors leur reconnaissance. Calder et al. (1996) ont conclu que la caricature augmente la distinctivité des visages.