L'effet de race consiste en ce que les visages des autres groupes ethniques sont plus difficiles à distinguer entre eux ou à reconnaître que les visages du groupe ethnique d'appartenance. Comme l'effet de distinctivité, cet effet a donné lieu à un très grand nombre d'études portant sur des groupes ethniques blancs caucasiens, noirs africains ou asiatiques (Bothwell, Brigham, & Malpass, 1989 ; Brigham, 1986 ; Carroo, 1986, 1987 ; Chance, Goldstein, & McBride, 1975 ; Chiroro & Valentine, 1995 ; Lindsay, Jack, & Christian, 1991 ; Lindsay, & Wells, 1983 ; Ng & Lindsay, 1994 ; Rhodes, Ronke, & Tan, 1990 ; Rhodes, Tan, Brake, & Taylor, 1989 ; Shapiro & Penrod, 1986 ; Shepherd, 1981 ; Valentine & Bruce, 1986b ; Valentine & Endo, 1992). La très grande majorité des études a montré que la reconnaissance de visages du groupe ethnique d'appartenance est meilleure que celle de visages d'autres groupes ethniques. Par ailleurs, les visages du groupe d'appartenance sont jugés plus distinctifs que les visages des autres groupes ethniques (Chiroro & Valentine, 1995 ; Valentine & Endo, 1992 ; Van Wallendael & Kuhn, 1997). L'utilisation d'une tâche de classification (visage-non visage) permet aussi de faire émerger un effet de race : les participants catégorisent moins rapidement les visages des autres groupes ethniques que ceux de leur propre groupe ethnique (Valentine, 1991 ; mais voir Valentine & Endo, 1992). Une asymétrie hémisphérique a même été mise en évidence (Bruyer & Schweich, 1987). Dans l'étude de Bruyer et Schweich (1987), par exemple, l'effet de race était plus important quand les visages étaient présentés dans le champ visuel gauche (i.e., à l'hémisphère droit). De plus, l'effet de race diminuait avec la familiarisation, mais uniquement dans ce champ visuel gauche.
L'entraînement et l'expertise sont très certainement à l'origine de cet effet. Rencontrant généralement plus d'individus du groupe ethnique d'appartenance, nous développons naturellement une expertise qui concerne directement ce type de visages. Les visages des autres groupes, qui se distinguent entre eux par des caractéristiques faciales différentes de celles du groupe d'appartenance, seront alors plus difficiles à discriminer (Shepherd, 1981 ; Shepherd & Deregowski, 1981). Dans ce sens, on a observé une diminution de l'effet de race chez des individus fréquentant souvent d'autres groupes ethniques (Carroo, 1986, 1987 ; Chiroro & Valentine, 1995 ; Lavrakas, Buri, & Mayzner, 1976) ou lorsqu'on entraînait des participants à discriminer et à reconnaître les visages de ces groupes (Goldstein & Chance, 1985 ; Lavrakas et al., 1976). Par ailleurs, plusieurs études indiquent que la stratégie habituellement mise en oeuvre pour reconnaître les visages du groupe d'appartenance (stratégie responsable de notre expertise), ne l'est pas pour les visages des autres groupes ethniques. Le renversement du visage dans le plan fronto-parallèle2 peut ainsi perturber davantage la reconnaissance des visages du groupe d'appartenance que celle des autres groupes (Rhodes et al., 1989 ; mais, pour une observation inverse, voir Valentine & Bruce, 1986b). La description verbale des traits favorise la reconnaissance des visages d'autres groupes (Fallshore & Schooler, 1995) alors qu'elle gêne celle des visages du groupe d'appartenance (Dodson, Johnson, & Schooler, 1997 ; Finger & Pezdek, 1999). Finalement, l'effet de race est moins fort lorsque les visages sont présentés dans le champ visuel droit et la familiarisation ne permet d'augmenter les performances que pour les visages présentés dans le champ visuel gauche (Bruyer & Schweich, 1987).
Goldstein et Chance (1980) ont expliqué l'effet de race par l'utilisation d'un "schéma facial"3 (voir aussi Valentine, 1991). Ce dernier serait acquis sur la base de l'apprentissage d'une population de visages rencontrée dans la vie quotidienne et il se développerait avec l'âge. Les visages rencontrés ultérieurement seraient alors traités en référence à ce schéma, qui deviendrait plus rigide et donc moins efficient pour traiter les stimuli inhabituels, comme les visages des autres groupes ethniques.
Cette manipulation est censée empêcher le traitement habituel ou "expert" du visage.
Goldstein et chance (1980) utilisent aussi cette notion pour expliquer l'effet de renversement du visage.