II.2. Localisation cérébrale de la catégorisation du genre

A notre connaissance, deux études seulement portent sur la latéralité hémisphérique de la catégorisation du genre. Elles n'indiquent soit aucune asymétrie (Sergent, 1986a) soit une supériorité - traditionnelle pour le visage - de l'hémisphère droit (Chiang, Ballantyne, & Trauner, 2000). De même, peu de patients présentent une atteinte sélective de la catégorisation du genre. Généralement, l'atteinte de la catégorisation du genre est observée en même temps qu'une atteinte de la reconnaissance du visage (prosopagnosie) où le cortex temporal est impliqué. Le seul patient non prosopagnosique présentant une perturbation de la catégorisation du genre a été décrit par Humphreys et al. (1993) et présente des lésions bilatérales et pariétales. Toutefois, les performances de ce patient dans la catégorisation du genre restent supérieures au hasard. En imagerie cérébrale, quatre recherches présentent l'activité cérébrale associée à une tâche de catégorisation du genre (Dubois et al., 1999 ; Kapur, Friston, Young, Frith, & Frackowiak, 1995 ; Narumoto, Yamada, Iidaka, Sadato, Fukui, Itoh, & Yonekura, 2000 ; Sergent et al., 1992). La plus ancienne de ces recherches montre une activation de la surface ventrale du cortex occipito-temporal droit (Sergent et al., 1992). Plus tard, Kapur et al. (1995) ont observé une activation bilatérale du cortex strié, ainsi qu'une activation bilatérale des gyrus lingual et fusiforme ainsi que de l'hippocampe et du gyrus parahippocampique droits. Dubois et al. (1999) ont rapporté une activation bilatérale du gyrus fusiforme lors d'une tâche de catégorisation du genre de visages inconnus ainsi que lors d'une tâche de catégorisation du genre de visages familiarisés. Ils ont aussi observé une activation gauche de l'amygdale pour les visages inconnus, qu'ils ont attribué au "danger" potentiel de ces visages. Finalement, Narumoto et al. (2000) ont rapporté une activation du gyrus lingual droit et du gyrus fusiforme latéral gauche. Notons que les activations observées dans les recherches de Kapur et al. (1995) et de Dubois et al. (1999) le sont aussi lors de tâches de reconnaissance.

En résumé, dans les chapitres 1 et 2, nous avons examiné les caractéristiques du visage qui permettent de l'identifier, de déterminer le genre ou d'inférer l'état émotionnel. Il apparaît que certaines caractéristiques faciales jouent un rôle important dans le traitement de plusieurs informations faciales. La configuration intervient notamment dans la reconnaissance du visage, dans la catégorisation du genre et dans la reconnaissance de l'expression faciale émotionnelle. De même, l'inversion du contraste, en perturbant le traitement des informations de surface, gêne non seulement la reconnaissance mais aussi la catégorisation du genre. D'autres caractéristiques, essentiellement celles relatives aux traits, semblent au contraire jouer un rôle plus ou moins important selon l'information faciale. Par exemple, le nez a peu d'importance pour reconnaître un visage mais peut en avoir pour déterminer le genre. De même, les cheveux (i.e., la coiffure) peuvent aider à l'identification et la catégorisation du genre, mais ne sont d'aucune utilité pour identifier l'expression faciale émotionnelle. Il semble aussi que les caractéristiques du visage les plus importantes pour extraire les informations d'identité, d'expression et de genre sont communes (i.e., configuration, information de surface). Ces informations se distinguent essentiellement sur des caractéristiques secondaires comme les traits.