I.2.2. Latence des réponses correctes : ....

une analyse de variance (3 x 2 x 6) a été appliquée à la latence des réponses correctes. Les variables analysées sont la tâche (catégorisation du genre vs. reconnaissance de l'expression faciale émotionnelle vs. appariement d'identité), la familiarité (connu vs. inconnu) et la manipulation (yeux masqués vs. nez masqué vs. bouche masquée vs. contraste inversé vs. visage renversé). Toutes ces variables sont des variables intra-sujets. Les moyennes et écart-types par condition sont présentés dans le Tableau 3.

La tâche a un effet significatif sur la latence des réponses correctes (F 2, 22) = 60.71, p<.0001) : les participants reconnaissaient plus lentement l'expression faciale émotionnelle qu'ils ne catégorisaient le genre (1061 ms vs. 602 ms ; F (1, 11) = 58.25, p<.0001) et qu'ils n'appariaient l'identité des visages (1061 ms vs. 589 ms ; F (1, 11) = 72.42, p<.0001). La différence n'est pas significative entre la catégorisation du genre et l'appariement d'identité.

La manipulation a aussi un effet significatif sur la latence (F (5, 55) = 4.99, p<.001) (voir Figure 11). Les réponses correctes sont plus rapides, par ordre croissant, lorsque le nez est dissimulé, le visage est entier, la bouche et les yeux sont dissimulés, le contraste est inversé et le visage est renversé (respectivement 711 ms, 722 ms, 744 ms, 749 ms, 777 ms et 798 ms). Le visage entier et la dissimulation du nez donnent lieu à des réponses correctes significatives plus rapides que l'inversion du contraste et le renversement du visage (plus petite différence : F (1, 11) = 16.06, p<.01). La dissimulation de la bouche donne lieu à des réponses plus rapides que le renversement (F (1, 11) = 6.84, p<.05). Toutes les autres différences ne sont pas significatives.

L'interaction entre la tâche et la manipulation est significative pour la latence des réponses correctes (F (10, 110) = 2.53, p<.01). La manipulation a donc un effet différent selon la tâche (voir Figure 12).

Pour la catégorisation du genre, les réponses sont plus rapides, par ordre croissant, lorsque le visage est entier, le nez, la bouche et les yeux sont dissimulés, le contraste est inversé et le visage est renversé (respectivement 553 ms, 572 ms, 576 ms, 578 ms, 661 ms et 667 ms). Les différences ne sont pas significatives entre le visage entier et la dissimulation des yeux, du nez et de la bouche mais ces manipulations donnent lieu à des réponses significativement plus rapides que l'inversion du contraste et le renversement du visage (plus petite différence : F (1, 11) = 9.06, p<.05). Ces deux dernières manipulations ne diffèrent pas entre elles.

Pour la reconnaissance de l'expression faciale émotionnelle, les réponses sont plus rapides, par ordre croissant, lorsque le nez est dissimulé, le contraste est inversé, le visage est entier, les yeux et la bouche sont dissimulés et le visage est renversé (respectivement 988 ms, 1017 ms, 1050 ms, 1088 ms, 1100 ms et 1124 ms). La dissimulation du nez et l'inversion du contraste donnent lieu à des réponses plus rapides que le renversement du visage (plus petite différence : F (1, 11) = 8.05, p<.05). Les réponses sont aussi plus rapides lorsque le nez est dissimulé plutôt que la bouche (F (1, 11) = 6.61, p<.05). Aucune autre différence n'est significative.

Pour l'appariement d'identité, les réponses sont plus rapides, par ordre croissant, lorsque la bouche est dissimulée, le visage est entier, le nez et les yeux sont dissimulés, le visage est renversé et le contraste est inversé (respectivement 555 ms, 565 ms, 573 ms, 581 ms, 604 ms et 654 ms). La latence des réponses correctes lorsque les yeux, le nez et la bouche sont dissimulés ne diffère pas significativement de celle pour le visage entier. L'inversion du contraste et le renversement du visage donnent lieu à des réponses plus lentes que toutes les autres manipulations (plus petite différence : F (1, 11) = 6.07, p<.05). De plus, l'inversion du contraste donne lieu à des réponses plus lentes que le renversement du visage (F (1, 11) = 8.94, p<.05).

Cette expérience permet plusieurs observations. La première porte sur les manipulations opérées sur les visages. On observe que le renversement du visage affecte le traitement des trois informations faciales : les participants font plus d'erreurs pour l'expression faciale émotionnelle et répondent plus lentement pour le genre et pour l'identité. La discriminabilité de l'expression est d'ailleurs moins bonne lorsque le visage est renversé et celle du genre et de l'identité tendent aussi à l'être. L'inversion du contraste provoque, par ailleurs, une diminution de la discriminabilité du genre et de l'identité qui s'accompagne d'une forte augmentation des erreurs et de la latence des réponses lorsque la tâche concerne ces deux informations. Elle n'affecte cependant que marginalement la reconnaissance de l'expression faciale émotionnelle puisque, pour cette dernière, seule une tendance a été observée au niveau de la discriminabilité. Notons cependant que, pour l'expression, l'inversion du contraste a donné lieu à une discriminabilité moins bonne que la dissimulation du nez. Au niveau des traits, la dissimulation du nez n'altère les performances d'aucune des trois informations. Seule la dissimulation des yeux et de la bouche donnent lieu à des différences entre les trois informations mais elles n'affectent que la reconnaissance de l'expression faciale émotionnelle.

La seconde observation est que la familiarité n'a pas la même influence selon la tâche. Le genre des visages connus utilisés dans l'expérience est moins discriminable et donne lieu à plus d'erreurs que celui des visages inconnus. Par contre, l'appariement de l'identité des visages connus est meilleur que celui des visages inconnus. Aucune influence de la familiarité sur la reconnaissance de l'expression faciale émotionnelle n'est observée.