Chapitre 6 : Influence du sourire et du genre sur la reconnaissance du visage

Les deux premières expériences que nous allons rapporter ont fait l'objet d'une publication et d'une communication orale :

Les deux expériences suivantes ont fait l'objet d'une communication orale :

L'objectif des quatre expériences que nous allons rapporter est de mettre à l'épreuve l'hypothèse selon laquelle les processus de reconnaissance du visage peuvent être influencés par des informations faciales sensées extraites par des modules indépendants. Deux types d'information ont été manipulés, l'expression faciale émotionnelle et le genre. L'expression est une information très variable chez un même individu. La reconnaissance de l'individu nécessite donc de ne pas la prendre en compte. Le genre, au contraire, est une information très stable. Il est même une des caractéristiques sémantiques des personnes familières. Il devrait donc aider à leur reconnaissance.

Les deux premières expériences ont pour objectif d'explorer les relations entre le traitement de l'expression faciale émotionnelle et l'accès à la familiarité d'un visage en examinant si l'expression émotionnelle affecte la décision de familiarité. Certaines études ont montré que le sourire influence significativement la reconnaissance des visages, principalement en l'améliorant (e. g., N. Endo et al., 1992; Kottoor, 1989; Sansone & Tiberghien, 1994). Mais d'autres auteurs n'ont observé aucun effet de l'expression émotionnelle (e. g., Bruce, 1982 ; Young et al., 1986b). Comme nous l'avons souligné, cet échec peut tenir à la manière dont l'expérience est construite. Notamment, des durées de présentation élevées et l'absence de contraintes sur le traitement peuvent permettre aux participants d'écarter facilement les informations expressives, ces dernières n'étant pas pertinentes pour la reconnaissance du visage.

Pour tester cette hypothèse, des visages souriants et neutres ont été présentés pendant 15 ms. L'utilisation d'un temps de présentation court, en comparaison à un temps long, tend à augmenter le nombre de fausses alarmes (Shepherd, Gibling, & Ellis, 1991). De plus, un temps si court interdit tout mouvement oculaire et, donc, toute exploration du visage. Or, Bloom et Mudd (1991) ont observé que le nombre de déplacements oculaires augmente avec la "profondeur" du traitement effectué par le participant. Une durée de présentation en 15 ms devrait donc donner lieu à plus de fausses alarmes et gêner l'extraction de la familiarité d'un visage. Une influence de l'expression émotionnelle - si elle est possible - devrait pouvoir être observée dans ces conditions.