4/ les garçons

Au début du siècle, les garçons constituent le deuxième service en importance, derrière les rayons. Il perd progressivement de son ampleur jusqu'en 1936.

l'unité du groupe

Le service des garçons est dirigé par un "premier garçon", qui est aussi à la tête du service expédition-réception des marchandises. En 1902, le terme "premier garçon est abandonné pour "chef des garçons", au moment où l'importance du travail justifie aussi la création d'un poste de "second garçon"377. A cette date, Lambert et Ponsard sont promus respectivement second et chef, tous les deux sont d'anciens "garçons".

Hommes à tout faire – leur nom indique bien qu'il s'agit d'un service exclusivement masculin –, les garçons transportent au service expédition les colis à envoyer, effectuent les livraisons, aident ponctuellement les vendeurs au rangement des banquettes extérieures, sont chargés du nettoyage du magasin après la fermeture puis de sa surveillance pendant la nuit378. Malgré la diversité des fonctions exercées, seul le poste de Jean-Pierre Dufour est précisé, il est "garçon ascenseur" : c'est lui qui manoeuvre l'ascenseur que le magasin a fait construire pour la clientèle379. Le terme "garçon" ne recouvre donc ni une fonction particulière, ni un lieu de travail particulier. L'organisation du travail des grands magasins les a repris directement du monde de la boutique. Comme les commis, ils sont d'ailleurs "nourris et logés". C'est même là que réside leur unité, dans des conditions de travail plus proches de celles des domestiques que des autres salariées du Grand Bazar. Au dos de leur bulletin d'admission, ils doivent écrire de leur main, comme François Dot : "tout garçon qui découche est remercié immédiatement"380. Le conseil parle aussi de leurs "gages"381, alors que c'est "appointements" qui est utilisé pour toutes les autres catégories de personnel. Ce sont enfin les seuls à porter un uniforme382. Au Grand Bazar, ce ne sont donc pas les jeunes vendeuses qui sont "enfermées et surveillées", mais bien les jeunes hommes383. En 1904, ils demandent pour la première fois collectivement qu'on les autorise à coucher "hors de la maison [c'est le terme employé]"384. Après avoir, "avec bienveillance", étudié la question, le conseil juge qu'il n'est pas possible de faire droit à cette pétition. "Pour améliorer leur condition et leur permettre de se marier, s'ils le désirent", il accorde aux garçons ayant plus de quatre ans d'ancienneté, une augmentation de salaire et l'autorisation de coucher chez eux pour ceux qui se marient, "lorsque les garçons célibataires sont en nombre suffisant pour assurer le service [de la garde de nuit]". En 1906, les garçons renouvellent leur demande385. Cette fois, leur chef estime qu'il est possible d'organiser le travail de nuit "avec un roulement de deux garçons anciens et un nouveau, qui coucheraient dans le local actuel sous la direction du chef ou du sous-chef des garçons". Puis deux ans plus tard, ils font valoir l'argument décisif : désormais, aux Deux Passages, les garçons ne couchent plus au magasin386. Alors, le conseil cède et se charge de trouver un service de garde nocturne qui les remplace.

Notes
377.

ADR, 133J003, PV du CA du 30 septembre 1902.

378.

Idem, PV du CA du 25 août 1902.

379.

ADR, 133J190, RES1n°20, entré le 7 octobre 1899.

380.

ADR, 133J199, B3n°25, entré le 24 novembre 1902.

381.

ADR, 133J003, PV du CA du 18 février 1898.

382.

Idem, PV du CA du 25 avril 1902.

383.

Article cité de Claudie Lesselier et contribution citée de Françoise Parent-Lardeur.

384.

ADR, 133J004, PV du CA du 12 avril 1904.

385.

Idem, PV du CA du 21 décembre 1906.

386.

Idem, PV du CA du 15 février 1908.