6/ le service de l'entretien

Le Grand Bazar emploie aussi des ouvriers, chargés d'effectuer les travaux d'entretien du magasin. Service de taille réduite, les "B" sont peu nombreux à y travailler – voir tableau début du chapitre. Les postes et leur évolution sont donc mal connus.

Il s'agit avant tout d'électriciens. Le bâtiment dans lequel s'installe le magasin en 1886 est équipé au gaz. Or, la direction du Grand Bazar mise dès le départ sur l'électricité : "l'installation est plus coûteuse que le gaz, mais les factures seront équivalentes, les risques d'incendie sont moindres et c'est une bonne publicité"⁴⁰⁸. Lorsque le magasin ouvre ses portes, des travaux importants ont déjà été effectués : l'électricité, que le Grand Bazar produit lui-même, a remplacé le gaz pour le chauffage et l'éclairage des espaces de vente⁴⁰⁹. Le reste des transformations, notamment dans les sous-sols et réserves, n'est ensuite effectué que progressivement, jusque dans les années 1890⁴¹⁰. Outre la maintenance des machines et des installations, les électriciens du Grand Bazar sont donc chargés des gros travaux de substitution de l'électricité au gaz.

Ils sont suffisamment nombreux jusqu'au début du 20e siècle pour former un service particulier, dirigé par un chef et un second. Léonard Déan, entré comme électricien en 1886⁴¹¹, devient second puis chef, en 1904, à la mort de Nallet⁴¹². Mais à sa mort, en 1909, il n'est pas remplacé, le service passe sous la direction de Ponsard, le chef des garçons. A cette date, les électriciens sont sans doute moins nombreux que quelques années auparavant : l'installation de l'électricité dans les locaux est en grande partie terminée et le Grand Bazar s'approvisionne désormais en électricité auprès de la Compagnie du Gaz. Déan est le seul homme "B" embauché comme électricien avant 1914. Ils sont cinq après la guerre.

Les électriciens sont les seuls ouvriers à être employés de manière permanente par le Grand Bazar (en dehors des rayons). Mais pour un travail précis de réparation ou de réaménagement du magasin, la société préfère aussi embaucher ponctuellement des ouvriers plutôt que passer un contrat avec une entreprise extérieure. C'est le cas en particulier pour les travaux de menuiserie. Le bois est, en effet, le matériau dominant au Grand Bazar, qui n'est que progressivement remplacé par du fer. Dès lors, il faut régulièrement refaire les parquets, consolider les poutres, entretenir les façades et le mobilier. En 1900 par exemple, la direction décide de changer certains comptoirs. Elle embauche alors un menuisier, puis un autre qui sera renvoyé dès que le gros des travaux sera effectué⁴¹³. En 1902, des travaux urgents de réfection des poutres du premier étage nécessitent aussi le recrutement d'une équipe de menuisiers, qui "sera congédiée dès que les travaux urgents seront terminés, sauf deux ouvriers, encore nécessaires pendant quelques temps à l'entretien de la maison"⁴¹⁴. Le fer est cependant substitué au bois quand l'occasion se présente. Lorsque les baies du premier étage sont changées en 1908, le cadre en bois est remplacé par un cadre en fer⁴¹⁵. Lorsque le 4e étage du magasin est ouvert en 1928, sous un plafond de verre, seule une architecture en fer est susceptible d'en soutenir le poids⁴¹⁶. Enfin, le sol de la galerie construite à mi-hauteur entre le rez-de-chaussée et le premier étage en 1929 est métallique⁴¹⁷. Le cachet du bois n'est cependant pas abandonné facilement : c'est en 1931 seulement que la direction décide que la peinture de toutes les devantures des immeubles appartenant à la société "sera faite à l'huile dans les tons gris et on abandonnera le faux bois en usage jusqu'à ce jour"⁴¹⁸.